«Pour parler d'avenir, il faut d'abord parler des racines», a posé d'emblée Emmanuel Macron, samedi soir, dans un lieu inédit pour une déclaration politique, le Théâtre de l'île, à Nouméa, qui fut tour à tour église, entrepôt, infirmerie, un «lieu palimpseste, à l'image de la Nouvelle-Calédonie». Le président de la République, qui se savait très observé, est allé aussi loin qu'il était possible dans la reconnaissance des torts de la France envers les Kanaks, sans braquer à l'excès les loyalistes, allergiques à toute forme de repentance. «Jamais nous n'oublierons la ségrégation des Kanaks parce qu'ils étaient kanaks. Sans terre, sans droits, sans services publics, sans honneur… La Nouvelle-Calédonie porte la mémoire de ces révoltes matées dans le sang et de ces divisions entre tribus organisées par le colonisateur pour asservir chacun.»
Il a aussi évoqué le temps du bagne, saluant «les dizaines de milliers d'hommes et de femmes, de l'Hexagone ou d'Algérie, qui ont abreuvé cette terre de leur sueur et de leur sang sous l'administration pénitentiaire.»Et clos le chapitre historique en célébrant les efforts accomplis par les communautés qui ont façonné le pays. Emmanuel Macron a appelé cette Calédonie contemporaine, communauté française sui generis - dont il a qualifié le fonctionnement institutionnel, fixé par les accords de Matignon et de Nouméa, de «modèle d'intelligence collective» -, à faire preuve de «responsabilité» lors du référendum, le 4 novembre. Pour que le choix se fasse «dans le calme», en se souvenant que «le jour d'après, chacune et chacun aura à travailler ensemble». Malgré le désir de certains dans le camp loyaliste qu'il prenne position pour le non à l'indépendance, il a confirmé ce qu'avait dit Edouard Philippe en décembre, devant le Congrès. «C'est aux Calédoniens qu'il revient de prendre position», a-t-il acté. Habile, il a brossé le rôle géopolitique, économique et environnemental que le «Caillou» serait amené à jouer au sein de sa stratégie indo-pacifique.
Macron s'est tourné en conclusion vers la jeunesse.«Un discours magnifique», a salué Sonia Backès, femme de tête des Républicains calédoniens. «Des propos rassurants» pour Roch Wamytan, président du groupe indépendantiste UC-FLNKS et Nationalistes au Congrès.