Le Parlement égyptien a définitivement adopté lundi les articles du projet de loi dit «de réglementation des activités du transport routier par technologie de l'information», visant particulièrement les sociétés Uber et sa rivale Careem, établie à Dubaï. Une première demande d'accéder aux bases de données - chauffeurs clients et courses effectuées - avait été présentée en juin 2017 par le gouvernement égyptien à Uber. La société californienne avait rejeté cette requête alors que l'Egypte représente son plus gros marché au Moyen-Orient avec 4 millions d'utilisateurs depuis 2014 et 157 000 conducteurs. Careem qui compte 3 millions d'abonnés avait également refusé l'accès à son logiciel qui traque les véhicules : pas question de laisser les autorités en faire un puissant instrument de contrôle aux mains de l'Etat.
Parallèlement, une bataille judiciaire avait été engagée entre les taxis du Caire et les sociétés de VTC. L'an dernier, au printemps, 42 taxis du Caire avaient déposé plainte auprès du tribunal administratif contre Uber et Careem pour usage illégal de véhicules privés comme taxis. En mars 2018, la justice a ordonné la suspension des deux sociétés. «Chaque fois qu'on avance d'un pas, on recule de plusieurs. Ces sociétés ont été plébiscitées par le public, ont offert des emplois à plein d'Egyptiens. C'est dans l'intérêt de qui de suspendre leurs activités ?» s'indigne un Cairote sur Twitter. Au Caire, de nombreux clients reprochent aux chauffeurs de taxis de ne pas souvent mettre en marche leur compteur, ou leur conduite dangereuse. Les deux compagnies de VTC ont fait appel auprès du tribunal des affaires urgentes (équivalent du référé) qui a suspendu le jugement et autorisé la poursuite de leurs activités jusqu'à la décision finale de la plus haute cour administrative. Mais le gouvernement a fait aussitôt appel de cette décision, invoquant des raisons fiscales, la concurrence déloyale faite aux taxis, mais aussi des raisons sécuritaires.
«Le citoyen qui ne veut pas être surveillé par les services de sécurité n'a qu'à utiliser les taxis ordinaires», a répliqué lundi le ministre des Affaires parlementaires aux quelques députés qui «au nom du respect de la vie privée» ont manifesté leur opposition à la loi votée. Les sociétés Uber et Careem ont six mois pour soumettre leurs données aux services de sécurité égyptiens. Mais d'autres recours pourraient déposés dans l'intervalle.