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Libération
Brexit stories

L’espace rétrécit bien au Royaume-Uni

Les Britanniques sont furieux du refus de Bruxelles de les laisser continuer à participer pleinement au programme de navigation européen Galileo.
Une fusée Ariane 5 transportant quatre satellites Galileo, du nom du programme européen censé concurrencer le GPS américain, le 17 novembre à Kourou. (Photo Stéphane Corvaja. AFP)
publié le 15 juin 2018 à 6h55

C’est donc confirmé. L’espace rétrécit au Royaume-Uni du Brexit. La décision mercredi de l’Agence spatiale européenne d’enclencher une nouvelle phase de développement du projet Galileo, le système de satellite de navigation européen supposé rivaliser avec le GPS américain, a rendu furieux les Britanniques. Les entreprises britanniques ne pourront pas participer à ce nouvel appel d’offres pour ce projet de 10 milliards d’euros. Tout simplement parce qu’à compter du 29 mars 2019, le Royaume-Uni deviendra un pays-tiers.

Or Galileo est un projet profondément européen. Le secrétaire d’Etat britannique à la Défense, Guto Bebb, a accusé la Commission européenne d’utiliser Galileo comme une «arme dans les négociations» sur le Brexit. Le député travailliste Hilary Benn a pour sa part jugé «insultant» que l’UE puisse mettre en doute l’engagement britannique en termes de sécurité pour l’Europe. Très concrètement, la polémique autour de la future participation du Royaume-Uni dans Galileo illustre le paradoxe profond qui domine toutes les discussions, depuis déjà deux ans, entre Londres et Bruxelles.

Ironie

La Commission, forte de son mandat d’une organisation légale, fondée sur des traités internationaux, reste campée sur un constat strict : en choisissant de quitter l’UE, le Royaume-Uni s’extrait de ce cadre et devient un pays-tiers qui doit être traité comme tel. De son côté, le Royaume-Uni estime que l’UE devrait faire preuve de plus de flexibilité et accepter d’assouplir ses règles de fonctionnement. Pour la simple raison qu’il considère ne pas être un pays comme un autre. Notamment sur les questions de sécurité et de défense, ce qui n’est pas totalement faux. Londres souhaite donc continuer à participer pleinement au programme Galileo, dans lequel il a déjà investi environ 1,1 milliard d’euros. Surtout, il souhaite conserver l’accès complet à la seule bande cryptée du programme, par ailleurs en libre-accès, le Public Regulated Service (PRS), à l’usage des gouvernements de l’UE.

Si Bruxelles n’exclut pas de laisser l’accès à cette bande cryptée à la défense britannique, elle refuse de lui en communiquer les codes. Londres a déjà menacé de se retirer complètement du projet pour en élaborer un indépendant, peut-être avec l’Australie. L’ironie est que le Royaume-Uni était initialement hostile au projet Galileo, et notamment à son volet défense. Essentiellement par crainte de déplaire à ses alliés américains et à leur GPS. Par ailleurs, alors que Londres s’est finalement lourdement engagé dans le projet, il a aussi participé à l’élaboration des règles strictes autour de Galileo et notamment à la décision d’exclure les pays-tiers de la conception des satellites et du PRS.