Menu
Libération
Merci de l'avoir posée

Que pèse vraiment l'agriculture biologique en France ?

Le gouvernement a revu ses ambitions à la hausse concernant les surfaces cultivées en agriculture biologique. Quelles régions sont les plus tournées vers le bio ? Où en est la France par rapport à ses voisin européens ? «Libération» fait le point.
Des légumes produits en agriculture biologique dans un supermarché bio Auchan, le 7 novembre 2017. (Photo Denis Charlet. AFP)
publié le 27 juin 2018 à 13h07

On n'en finit plus avec les annonces concernant l'agriculture biologique. Lundi, le gouvernement a fixé l'objectif d'atteindre 15 % de surfaces bio en 2022. Quelques mois après la victoire d'Emmanuel Macron à l'élection présidentielle, le ministre de l'agriculture, Stéphane Travert, avait donné un premier chiffre moins ambitieux : il tablait sur 8 % des surfaces d'ici à 2021. Au sein du gouvernement précédent, son homologue Stéphane Le Foll avait parlé de 10 % à la même échéance. La France va devoir mettre les bouchées doubles pour respecter le nouvel engagement. Actuellement, un peu plus de 6,5 % de la surface agricole utilisée est consacrée à l'agriculture biologique. Une enveloppe de 1,1 milliard d'euros doit y être consacrée.

Les nouvelles prévisions misent sur l'explosion du bio. Pour atteindre les ambitions du gouvernement Macron, il faudrait multiplier par 2,3 la part des terres consacrées à l'agriculture biologique en seulement quatre ans. Une telle progression ne s'est jusqu'ici jamais produite. Pourtant, le bio a connu une première hausse significative à partir de 2008, puis une deuxième, plus marquée, à partir de 2014. Ces trois dernières années, la part des terres en agriculture bio a été multipliée par 1,6. Extension qui s'explique surtout par l'augmentation constante du nombre d'exploitations agricoles bio : elles étaient 37 000 fin 2017, contre un peu moins de 15 000 il y a dix ans. Les fermes les plus répandues sont celles qui produisent des bovins (20 %). Les grandes cultures (15 %) et la viticulture (18 %) complètent le podium.

Dans le détail, comment se répartissent les différents types d'agriculture aujourd'hui ? Plus de 93 % des terres cultivées sont toujours en conventionnel (27 millions d'hectares), mode le plus utilisé dans le monde et pour lequel les pesticides sont autorisés. Le reste est dédié au bio, et recouvre à la fois les surfaces certifiées bio (1,25 million d'hectares) et celles en conversion du conventionnel vers le bio (520 000 hectares). Près des trois quarts des cultures bio sont des surfaces fourragères, environ 20 % sont destinées aux grandes cultures et le reste est partagé entre vigne et maraîchage. Le bio occupe 28 % des surfaces de production de légumes secs, 20 % pour les fruits frais, idem pour la filière des plantes à parfum, aromatiques et médicinales, et 10 % des vignes nationales.

Une présence forte dans le Sud

La région qui compte le plus de producteurs engagés en bio est de loin l'Occitanie avec 8 100 fermes. L'Auvergne-Rhône-Alpes et la Nouvelle Aquitaine suivent avec plus de 5 300 chacune. Les Hauts-de-France, l'Outre-Mer, la Corse et l'Ile-de-France, arrivent en queue de peloton mais sont aussi les régions qui ont enregistré la plus forte progression puisqu'elles ont toutes gagné au moins 21 % de fermes bio supplémentaires entre 2016 et 2017.

A l'échelle des départements, les Hautes-Alpes ont la plus grosse proportion de terres consacrées au bio (27,4 %), bien au-dessus de la moyenne nationale (6,5 %). Les Pyrénées-Orientales, les Bouches-du-Rhône et la Drôme se détachent aussi, avec environ un quart des terres en agriculture bio. L'Aveyron, suivi par le Gers, est le territoire ayant le plus de surface en conversion (23 700 hectares). En revanche, si l'on regarde le nombre de fermes, avec près de 1 200 producteurs bio chacun, la Drôme et le Gers occupent la première place du classement.

Alors qu'en Autriche, en Suède et en Estonie, on s'approche du quart de surface agricole destinée au bio, la France reste bien en dessous de la moyenne européenne. En 2016, l'Espagne détenait le record en nombre d'hectares cultivés (2 millions), devant l'Italie, la France et l'Allemagne.

Consommation

En 2017, les Français ont acheté pour 8 milliards d'euros de produits bio, restauration comprise. C'est 4,4 % de la consommation alimentaire générale. «Entre 2011 et 2016, le marché alimentaire des produits bio a progressé de plus de +82 %», précise l'Agence Bio dans son rapport 2018. Tendance confirmée en 2017. La France est le deuxième pays consommateur de bio en Europe, derrière l'Allemagne. Les achats concernent surtout le rayon épicerie (24 %), puis les fruits et légumes frais (19 %).

Les circuits de distribution ont aussi évolué, avec le boom des produits bio en super et hypermarchés. Désormais, les Français achètent presque la moitié des produits bio consommés dans les grandes et moyennes surfaces. Les magasins spécialisés arrivent derrière, mais représentent le premier circuit de distribution des fruits et légumes bio (45 % des ventes). Enfin, la vente directe est spécialement développée dans les secteurs du vin.

Près de 70 % des produits bio consommés dans le pays sont produits en France, mais l'import est en légère croissance. Presque la totalité du vin, des boissons alcoolisées et des œufs bio est «made in France», alors que dans la catégorie mer, saurisserie et fumaison, on doit importer 77 % des denrées. Idem du côté des produits dits «exotiques» (café, cacao, bananes, agrumes…), qui doivent voyager.