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Libération

Echanges de tirs à Gaza : «C’est comme ça que tout avait commencé il y a quatre ans»

publié le 15 juillet 2018 à 20h26

Pendant vingt-quatre heures, de vendredi soir à samedi soir, Israéliens et Gazaouis ont renoué avec les routines de la guerre : raids israéliens, roquettes palestiniennes, télés en édition spéciale, course aux abris. La dernière guerre ouverte entre l’Etat hébreu et le Hamas remonte à 2014. Aucune partie ne souhaite en revenir là, tel est le message martelé par leurs émissaires. Ce week-end, c’est une nouvelle répétition générale qui s’est jouée, coûtant la vie à quatre Palestiniens, dont trois mineurs. Côté israélien, à Sdérot, une roquette Qassam a blessé légèrement trois habitants réfugiés dans un abri.

De nuit comme de jour, les chasseurs israéliens ont pilonné la bande de Gaza, visant «40 cibles terroristes liées au Hamas», dixit Tsahal. C'est dans la destruction d'un «centre d'entraînement à la guérilla urbaine» que deux Gazaouis de 15 et 16 ans ont péri dans les décombres alors qu'ils se trouvaient dans la rue. Pour le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, l'opération est le «coup le plus dur» porté au Hamas depuis 2014.

Simultanément, les factions palestiniennes, Hamas et Jihad islamique en tête, ont fait s'abattre près de 200 obus de mortiers et roquettes sur les kibboutz et villes frontalières, dont une centaine en plein après-midi. La majorité des projectiles ont explosé dans des zones inhabitées, le système antimissile Dôme de fer en interceptant une quarantaine d'autres. «Journée éprouvante, témoigne Daniel Rahamim, l'un des doyens du kibboutz de Nahal Oz. C'est exactement comme ça que tout avait commencé il y a quatre ans.»

De précédents accès de fièvres ont eu lieu fin mai et fin juin, mais le fait que la passe d’armes entre Israël et le Hamas se déroule en plein jour dénote une réelle escalade. Dans la soirée de samedi, le Hamas et le Jihad islamique ont annoncé un cessez-le-feu sous la houlette du Caire. Mais deux heures après l’annonce, de nouveaux tirs de mortiers entraînaient une réplique israélienne. Dimanche, Gaza a annoncé le décès d’un père et son fils de 13 ans dans une explosion de source inconnue.

Tsahal s'est borné à faire savoir qu'il ne reconnaîtrait que les «faits du terrain». Soit l'arrêt des roquettes et la fin des cerfs-volants ou ballons incendiaires qui ont détruit depuis deux mois des dizaines d'hectares de terres arables israéliennes. Critiqué à droite comme à gauche pour son «immobilisme» face à ces incendies, Nétanyahou a promis samedi que «si le Hamas n'a pas compris le message aujourd'hui, il le comprendra demain». Pas assez pour Naftali Bennett, ministre de l'Education et influent leader du Foyer juif (pro-colon), qui considère le cessez-le-feu «dicté par le Hamas» et pousse pour une opération «en profondeur» dans Gaza.

Pour Ofer Zalzberg, du Crisis Group, le mouvement islamiste perçoit la vulnérabilité de Nétanyahou, qui n'a pas de réelle stratégie post-Hamas pour Gaza. «Nétanyahou n'a qu'un argument de vente, celui d'être monsieur Sécurité. C'est pour ça qu'il en veut en finir rapidement avec Gaza. Mais la dissuasion ne fonctionne que si le camp d'en face a beaucoup à risquer. Sa stratégie a été d'affaiblir le Hamas au fil des années sans voir plus loin. Aujourd'hui, le Hamas n'a plus grand-chose à perdre.»