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Libération

Politique migratoire : Berlin englué

publié le 15 août 2018 à 20h46

Alors que l'Allemagne s'est engagée à accueillir «jusqu'à 50» des 141 migrants sauvés par l'Aquarius, qui va finalement accoster à Malte (lire p. 13), le pays reste empêtré dans les méandres de sa politique migratoire, sous pression de la droite conservatrice et de l'extrême droite. Le sujet fut un des enjeux majeurs des législatives de septembre. Et l'une des pierres angulaires des négociations entre chrétiens-démocrates et sociaux-démocrates lors de la formation d'une coalition gouvernementale. Face à la pression de la droite ultraconservatrice, un plafond annuel de réfugiés a été fixé à environ 200 000 personnes par an, et de nouvelles règles plus restrictives concernant le regroupement familial ont été mises en place le 1er août. Tout a donc été fait pour accéder aux exigences du partenaire bavarois de la CDU de Merkel, la CSU.

Car ces sourdes tensions avaient éclaté en juin, le turbulent ministre de l'Intérieur CSU, Horst Seehofer, décidant de refouler dès le 1er juillet tout demandeur d'asile enregistré dans un autre pays de l'UE. Angela Merkel, redoutant un effet domino en Europe, s'y était farouchement opposée. En retour, Seehofer avait menacé de démissionner avant de changer d'avis. Merkel a donc passé le dernier sommet européen, fin juin à Bruxelles, à tenter de sauver son gouvernement. Elle a ainsi négocié à la chaîne des accords bilatéraux avec d'autres pays européens afin de leur remettre les demandeurs d'asile arrivant en Allemagne et déjà enregistrés chez eux.

Peu de temps après, elle signait un accord avec Horst Seehofer. Celui-ci prévoit notamment la création de centres de rétention pour migrants, le temps de l'examen de leur dossier. Le premier a ouvert en Bavière le 1er août. Durcissement encore : depuis mi-juillet, le gouvernement allemand veut inscrire l'Algérie, le Maroc, la Tunisie et la Géorgie sur sa liste des pays dits «sûrs» : cela permettrait aux services de l'immigration de rejeter de façon quasi automatique les demandes d'asile de leurs ressortissants.

Et samedi, Merkel a signé le premier de ces fameux accords bilatéraux avec Pedro Sanchez, le Premier ministre espagnol. Désormais, les migrants déjà enregistrés en Espagne et arrivant à la frontière germano-autrichienne pourront y être expulsés dans les quarante-huit heures. Mais les principales portes d’entrée restent la Grèce et l’Italie. Or, le ministre italien de l’Intérieur d’extrême droite, Matteo Salvini, a fait savoir que Rome exigeait un renforcement des frontières extérieures de l’UE avant tout accord sur les migrants déjà présents en Europe.