Menu
Libération

Etats-Unis : cinq ans de prison pour une lanceuse d’alerte

publié le 24 août 2018 à 19h56

Elle est la première lanceuse d'alerte de l'ère Trump jugée au titre de l'Espionage Act, cette loi désormais centenaire utilisée sous Obama pour poursuivre Chelsea Manning et Edward Snowden. Jeudi, Reality Winner, 26 ans, a été condamnée à cinq ans et trois mois de prison par un tribunal de Géorgie pour avoir transmis à la presse un document classifié sur des tentatives de piratage attribuées à la Russie. Soit «la sentence la plus lourde jamais prononcée contre la source d'un média dans un tribunal fédéral», relève la Freedom of the Press Foundation.

Le 5 juin 2017, le site d'investigation américain The Intercept révélait le contenu d'un rapport confidentiel émanant de la NSA. Daté du mois précédent, ce document détaille la façon dont des pirates informatiques ont visé des administrations et des systèmes informatiques d'organisation des scrutins. Une activité que l'agence américaine attribue au renseignement militaire russe, le GRU, déjà accusé d'avoir piraté le Comité national démocrate en 2016. Moins d'une heure après la parution de l'article, le département de la Justice annonçait la mise en examen de Reality Winner, employée de Pluribus International, un sous-traitant du renseignement américain, l'accusant d'avoir transmis à un média un document classifié, ce qu'elle a reconnu.

En juin, l'équipe de défense de Winner a négocié un accord de plaider coupable. Jeudi, la jeune femme a dit assumer «l'entière responsabilité» de ce qu'elle a qualifié d'«erreur incontestable». Les procureurs l'ont accusée d'avoir «causé un dommage exceptionnellement grave à la sécurité nationale». Une assertion que les soutiens de Winner ne sont pas les seuls à réfuter. «Personne n'a été mis en danger, personne n'a vu son identité révélée, les Russes ont juste appris que lorsqu'ils s'introduisent dans nos systèmes, nous sommes capables de les repérer, ce qu'ils savaient déjà, estime l'ancien avocat au département de la Justice Robert Cattanach, cité par le New York Times. Ce genre de condamnation est destiné à avoir un effet dissuasif.» Vendredi, le président Donald Trump a réagi par un tweet, estimant que les faits commis par la jeune femme n'étaient que de la «petite bière» au regard de ceux qu'il reproche à Hillary Clinton.