Menu
Libération
Sous le vent

Le transports de marchandises remet les voiles

Des échanges maritimes qui coûtent moins cher à la planète, c'est possible.
Un chargement de café (DR)
publié le 30 août 2018 à 19h46

Peu cher, régulier, massif, le transport maritime mondial fait exploser chaque année des chiffres qui donnent le tournis : 10,3 milliards de tonnes ont été déplacées par des dizaines de milliers de cargos en 2016, soit environ 90 % du trafic commercial. Ces marchandises et matières premières voyagent sur des embarcations de plus en plus gigantesques (jusqu’à 400 mètres de long), voraces en fioul lourd.

Résultat : les échanges maritimes, oubliés des accords sur le climat, représentent 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, quasiment l'équivalent de celles de l'Allemagne. «La mer est considérée comme un grand tapis sous lequel on balance tous les déchets. Les pollutions on s'en fout ! Tout cela se passe dans les eaux internationales», grince Guillaume Le Grand. Le jeune homme fait partie des marins qui anticipent la fin d'un système voué à sa perte avec la flambée promise des prix du pétrole. En 2011, il a faitle pari du transport de marchandises à la voile en fondant Towt. Si elle n'ambitionne pas de concurrencer les mastodontes des océans, son entreprise, aujourd'hui à l'équilibre, réalise deux allers-retours transatlantiques par an à une vitesse de 8,5 nœuds (contre 14 à 16 nœuds pour un cargo conventionnel).

Les voiliers affrétés par Towt n'utilisent leurs moteurs que pour les manœuvres et la vie à bord. Mesurant de 20 à 40 mètres, ils transportent proprement depuis le bout du monde du café, rhum, etc. vendus notamment dans les Biocoop sous le label «Anemos, transporté à la voile», permettant au consommateur d'en connaître le bilan carbone.

«Comment va-t-on continuer à boire du café et à manger du chocolat, ce qui ne poussera jamais ici, dans un monde où le prix du baril explose ? Le coût du fret conventionnel va nécessairement exploser», rappelle Le Grand. L'entreprise souhaite financer d'ici 2021 un voilier-cargo de 60 mètres de long, avec trois mâts, capable de transporter 1 000 tonnes de marchandises et avançant à 12,5 ou 13 nœuds de moyenne. «Le bilan carbone va être encore plus faible que sur les vieux gréements actuels. Quant au taux de fret, il sera divisé par sept ou huit.»

Quant aux bateaux à moteurs, certains se creusent les méninges pour réduire leur impact carbone. En 2007, deux ans après que Jean-Luc Péloquin a équipé son chalutier le P'tit Mousse de voiles, c'est le navigateur Yves Parlier qui s'est lancé dans l'installation de voiles de kite sur des bateaux à moteur. Le but est le même : limiter le coût et les pollutions. «La dépendance des armateurs au coût du carburant est très grande et cela m'a paru évident de réutiliser le vent pour hybrider les bateaux à moteurs», explique l'ancien coureur. Si les économies réalisées dépendent de nombreux paramètres - force et direction du vent, surface du kite, type de bateau - une simulation réalisée sur une traversée de l'Atlantique en cargo avec une voile de 320 mètres carrés laisse espérer une réduction de 26 % de la consommation de carburant.