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Libération

Seehofer-Merkel : nouvelles tensions sur la question migratoire

publié le 7 septembre 2018 à 20h36

En Allemagne, les crises gouvernementales se suivent et se ressemblent. Depuis la formation de la coalition au printemps, Angela Merkel est régulièrement en désaccord avec son ministre de l’Intérieur, Horst Seehofer (CSU). Encore et toujours le même sujet les oppose : la politique migratoire.

Après s'être fait discret lors des événements de Chemnitz (lire pages 12-13), condamnant tardivement et timidement les violences qui y ont eu lieu, le turbulent Seehofer a rallumé la mèche jeudi. «La question migratoire est la mère de tous les problèmes dans ce pays», a-t-il déclaré lors d'un entretien au quotidien Rheinische Post, ajoutant défendre cette position «depuis trois ans» - c'est-à-dire depuis la mise en place de la politique d'accueil de réfugiés insufflée par Angela Merkel en 2015.

Ces propos ont indigné à gauche. «Irresponsable», commente la députée sociale-démocrate Aydan Ozoguz. «J'ai l'impression que le ministre de l'Intérieur est le père de tous les problèmes liés au racisme», commente la porte-parole du groupe parlementaire de Die Linke, Ulla Jelpke. Le vice-président du Bundestag, Thomas Oppermann (SPD), enfonce le clou à la radio publique allemande vendredi matin : «Seehofer n'est pas la bonne personne à ce poste», et ajoute qu'il «parle comme un politique de l'AfD».

D'autant que Seehofer a expliqué dans le même entretien «qu'en tant que citoyen», il serait «aussi descendu dans les rues» de Chemnitz. «Pas avec les radicaux», précise-t-il. Ainsi, en Allemagne, le ministre de l'Intérieur se décrit en quelque sorte comme un de ces Wutbürger, les «citoyens en colère», qui forment les contingents xénophobes de Pegida et de l'AfD - lesquels éructent également des slogans très hostiles à la chancelière. Comme d'habitude, Angela Merkel s'est rapidement distanciée des propos de son ministre. «La question migratoire nous pose des défis. Avec elle, il y a des problèmes, mais aussi des succès», a-t-elle déclaré lors d'une interview télévisée jeudi. Elle note que les événements de Chemnitz ont mis au jour une «atmosphère tendue», dans laquelle «chacun doit prendre position».

Les tensions entre Angela Merkel et Horst Seehofer font désormais partie du paysage politique en Allemagne. Il y eut le fameux «l'islam ne fait pas partie de l'Allemagne» lancé avec fracas par un Seehofer tout juste nommé, au printemps - venant contredire la chancelière. Il y eut ensuite la crise gouvernementale majeure de ce début d'été, où la grande coalition faillit éclater, sous l'impulsion de Seehofer et sa réforme de la politique migratoire.

Au-delà de l’antagonisme, réel, entre Merkel et Seehofer, ces tensions reflètent le dilemme qui agite ces deux partis historiquement alliés que sont la CDU et la CSU. Leurs yeux sont rivés sur la Bavière, où se déroulent des élections à valeur de test le 14 octobre et où l’extrême droite semble promise à une progression spectaculaire.