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Libération
Éditorial

Absurdité

publié le 19 septembre 2018 à 20h56

Le Brexit a été voté. Brexit il y aura. A moins d’un invraisemblable coup de théâtre - un référendum convoqué par les autorités britanniques pour revenir sur le premier vote-, la Grande-Bretagne quittera bien l’Union européenne à l’échéance prévue. Voilà qui réduit à néant la fable colportée jusqu’à plus soif par les souverainistes, selon laquelle l’Europe serait une prison des peuples. Etrange prison dont on peut sortir quand on veut…

Sauf que la chose n'est pas simple et met en lumière les insondables contradictions des anti-européens. Au fil des ans, les Irlandais du Nord se sont rapprochés des Irlandais du Sud. Mais la Grande-Bretagne sort de l'Europe : il faut donc rétablir une frontière dans l'île, entre l'Irlande européenne (au sud) et l'Irlande anglaise (au nord). Perspective totalement contraire au processus hautement bénéfique enclenché par les accords de paix signés il y a des lustres. Alors même qu'ils sont à près de 70 % favorables au maintien dans l'UE, il faut imposer aux habitants de l'Ulster une séparation physique avec leurs frères du Sud. Absurde, archaïque, dangereux. Depuis qu'il a dit «Brexit means Brexit», le gouvernement de Londres tourne autour de ce problème comme une mouche dans un bocal. Rétablir la frontière, c'est risquer de rallumer des feux mal éteints. Ne pas le faire, c'est contredire frontalement les clauses obligatoires du Brexit, puisqu'il faut bien une frontière entre Grande-Bretagne et Europe. On propose de repousser la frontière dans la mer, autour de l'Ulster : c'est créer cette fois une frontière interne au Royaume-Uni. Tout aussi absurde. Alors qu'il était si simple, on le voit tous les jours, de rester dans l'Union…

Reste une solution, qui est comme l’œuf de Colomb : réunifier enfin l’île, qui serait tout entière membre de l’Union européenne. Solution pacifique, efficace et simple. Mais les nationalistes anglais ou pro-anglais s’y opposeront…