La Commission européenne a décidé le 12 octobre de ne pas renouveler l'autorisation de mise en marché du diquat, qui ne sera plus commercialisé à partir du 4 mai 2019, avec un délai d'utilisation jusqu'en février 2020 pour les cultivateurs. Deux autres substances, le thirame et la pymétrozine, sont également interdites. Une troisième, le malathion, dont le risque qu'il représente pour les oiseaux a été identifié, ne pourra plus être utilisée qu'en serre.
Qu’est-ce que le diquat ?
Le diquat est une substance contenue dans des herbicides comme le Reglone 2, un produit utilisé notamment dans le défanage chimique des pommes de terre. Cette opération permet de minimiser les risques de maladies des feuilles de pommes de terre et de mieux contrôler le calibre du tubercule.
Pourquoi cette substance a-t-elle été interdite ?
La licence de la substance active avait expiré en 2012, mais elle avait été réautorisée jusque-là sur des bases temporaires. Le diquat est considéré comme une substance très toxique, plus encore que le glyphosate, depuis plusieurs années : en 2015, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) partageait de sérieuses inquiétudes sur son utilisation. Une exposition au diquat pour des travailleurs agricoles constituait ainsi un «sujet de préoccupation critique» selon l'EFSA, qui indiquait que la substance pouvait potentiellement perturber le système hormonal des personnes exposées au produit et dérégler les cycles naturels de reproduction des animaux et des mammifères.
En mars, le site d'information Politico racontait comment le géant suisse de l'agrochimie Syngenta, qui produit le Reglone 2, avait empêché jusque-là l'interdiction du diquat en convainquant les membres de la Commission européenne de remettre en question la méthodologie de leur propre agence de sécurité alimentaire. Syngenta a réagi à l'interdiction du diquat vendredi en déclarant dans un communiqué, selon Farmers Weekly : «Nous sommes convaincus que le diquat joue un rôle vital dans la production agroalimentaire. L'Europe vient malheureusement de perdre un élément important pour la compétitivité de son agriculture.»
Pourquoi cette interdiction est-elle inhabituelle ?
En juillet dernier, en comité d'appel, les Vingt-Huit avaient échoué à se prononcer sur la proposition visant à interdire les quatres substances dont le diquat, faute de majorité suffisante. C'est finalement la Commission européenne qui a pris seule cette responsabilité, suivant l'avis de 2015 de l'EFSA. Vendredi, le président de la commission spéciale «pesticides», l'eurodéputé PS Eric Andrieu, a ainsi salué «la décision de la Commission de prendre ses responsabilités, […] un premier pas vers une application stricte du principe de précaution».