La Cour suprême du Pakistan a acquitté mercredi en appel la chrétienne Asia Bibi, condamnée à mort pour blasphème en 2010 et dont le cas avait suscité l'indignation à l'étranger et des violences dans le pays. «Elle a été acquittée de toutes les accusations», a déclaré le juge Saqib Nisar lors de l'énoncé du verdict, ajoutant que Mme Bibi, qui se trouve actuellement incarcérée dans une prison à Multan (centre), allait être libérée «immédiatement».
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L'avocat de Mme Bibi, Saif-ul-Mulook, a aussitôt appelé sa cliente au téléphone pour lui annoncer la nouvelle depuis le tribunal. «Avez-vous entendu que vous êtes un être humain libre à présent ? Vous pouvez prendre votre envol et aller où vous voulez», lui a-t-il dit en présence d'un journaliste de l'AFP. «Quoi ? vraiment ? Je ne sais pas quoi dire», lui a-t-elle répondu avant de se répandre en remerciements. En pratique, la libération d'Asia Bibi pourrait toutefois prendre plusieurs jours en raison de procédures bureaucratiques, a indiqué l'avocat.
Dispute autour d’un verre d’eau
«Justice a été rendue, c'est une victoire pour Asia Bibi. Le verdict montre que les pauvres, les minorités et la fraction la plus modeste de la société peuvent obtenir justice dans ce pays en dépit de ses défauts», s'est-il encore félicité. Le verdict pourrait susciter la fureur des milieux religieux fondamentalistes qui appelaient de longue date à l'exécution de Mme Bibi. Mercredi, la capitale Islamabad avait été placée sous haute sécurité, avec des barrages sur les routes notamment à proximité des quartiers où vivent les magistrats et la communauté diplomatique.
Asia Bibi, mère de cinq enfants, avait été condamnée à la peine capitale à la suite d'une dispute avec une musulmane au sujet d'un verre d'eau. Son cas avait eu un retentissement international, attirant l'attention des papes Benoît XVI et François. En 2015, l'une de ses filles avait rencontré ce dernier. Au Pakistan même, l'histoire de cette chrétienne d'origine modeste divise fortement l'opinion. Le blasphème est un sujet extrêmement sensible dans ce pays très conservateur où l'islam est religion d'Etat. La loi prévoit jusqu'à la peine de mort pour les personnes reconnues coupables d'offense à l'islam.