Sans le savoir, le gouvernement polonais a fait écho aux revendications des «gilets jaunes». Lors de l'ouverture officielle lundi de la 24e Conférence des Nations unies sur le climat (COP 24), à Katowice dans le sud du pays, Varsovie a proposé aux 30 chefs d'Etat présents d'adopter une «déclaration de Silésie sur la solidarité et la transition juste».
La Silésie, région où se déroule la conférence, est une terre de charbon, une des énergies les plus polluantes. «Pour réduire les émissions de gaz à effet de serre [GES], les politiques publiques vont être confrontées à des résistances sociales et d'importants risques politiques, si elles ne sont pas accompagnées de programmes de sécurité sociale pour les travailleurs», a alerté la présidence polonaise. Au moment même où les manifestations contre la hausse de la taxe carbone sur les carburants se multiplient en France.
De son côté, la Pologne, régulièrement critiquée pour son soutien à l'industrie charbonnière, rappelle qu'éliminer les énergies fossiles signifie aussi mettre sur le carreau les ouvriers spécialisés dans cette industrie. La question de la «transition juste» a longtemps été considérée comme un sujet mineur dans les négociations internationales, où l'attention se concentre sur les réductions d'émissions de GES des pays et sur les montants des financements internationaux.
«C'est pourtant un sujet très important pour beaucoup de pays en développement, et d'autres comme l'Allemagne ou l'Espagne qui tâtonnent pour encadrer la sortie du charbon, note le directeur scientifique de l'Institut du développement durable et des relations internationales, Michel Colombier. La planification de la réindustrialisation de ces régions, qui risquent d'être sinistrées, est essentielle pour la réussite de la transition écologique.» Les opportunités économiques sont énormes. «Aux Etats-Unis, il existe plus d'emplois dans l'industrie solaire que dans celle du charbon, du pétrole et du gaz réunis. Le secteur photovoltaïque crée des emplois 17 fois plus vite que le reste de l'économie», rappelle Mohamed Adow de l'ONG Christian Aid. En Pologne, le gouvernement doit encore démontrer sa sincérité dans sa volonté de passer au 100 % renouvelable : son récent projet de loi sur l'énergie prévoit toujours 60 % de charbon dans son mix énergétique pour 2030.