Sans le savoir, le gouvernement polonais fait écho, lundi, aux revendications des «gilets jaunes» français. Lors de l'ouverture officielle de la 24e conférence des Nations unies sur le climat (COP 24), à Katowice dans le sud du pays, Varsovie a proposé aux 30 chefs d'Etats présents d'adopter une «déclaration de Silésie sur la solidarité et la transition juste». La Silésie, région où se déroule la conférence onusienne, est historiquement une terre de charbon (une des énergies les plus polluantes).
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«Les politiques publiques pour réduire les émissions de gaz à effet de serre vont être confrontées à des résistances sociales et d'importants risques politiques, si elles ne sont pas accompagnées de programmes de sécurité sociale pour les travailleurs», a alerté la présidence polonaise. Les détracteurs actuels du président Macron ne pourraient dire mieux, alors que les manifestations contre l'injustice sociale, exacerbée par la hausse de la taxe carbone sur les carburants, se multiplient dans l'Hexagone. Le Premier ministre, Edouard Philippe, avait prévu de donner un discours à Katowice lundi, mais a annulé pour consacrer sa journée à la gestion de la crise des gilets jaunes.
De son côté, la Pologne, régulièrement critiquée pour son soutien à l’industrie charbonnière, rappelle qu’éliminer les énergies fossiles signifie aussi mettre sur le carreau les ouvriers spécialisés dans cette industrie.
Sincérité ou hypocrisie ?
La question de la «transition juste» a longtemps été considérée comme un sujet mineur dans les négociations internationales. L'attention se concentre sur les réductions d'émissions de gaz à effet de serre des pays et sur les montants de financements internationaux. «C'est pourtant un sujet très important pour beaucoup de pays en développement, et d'autres comme l'Allemagne ou l'Espagne qui tâtonnent pour encadrer la sortie du charbon, assure Michel Colombier, directeur scientifique de l'Institut du développement durable et des relations internationales. La planification de la réindustrialisation de ces régions, qui risquent d'être sinistrées, est essentielle pour la réussite de la transition écologique.»
Les opportunités économiques sont énormes. Mohamed Adow de l'ONG Christian Aid rappelle : «Aux Etats-Unis, il existe déjà plus d'emplois dans l'industrie solaire que dans celle du charbon, du pétrole et du gaz réunis. Le secteur de l'énergie photovoltaïque crée des emplois 17 fois plus vite que le reste de l'économie.»
Les bonnes intentions polonaises posées, le gouvernement doit encore démontrer sa sincérité dans sa volonté de passer au 100% renouvelable. Dans un projet de loi sur l’énergie, présenté juste avant la COP 24, Varsovie prévoit toujours 60% de charbon dans son mix énergétique pour 2030.