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Libération

La justice japonaise charge un peu plus Carlos Ghosn

publié le 11 janvier 2019 à 20h36

Et de trois. Alors que sa garde à vue arrivait à expiration, Carlos Ghosn a appris vendredi qu’il venait d’écoper de deux nouveaux chefs d’inculpation. Ses avocats menés par Motonari Otsuru ont immédiatement demandé une libération sous caution, tout en admettant qu’elle avait peu de chance d’aboutir.

L'avenir semble s'assombrir encore pour l'ancien patron tout-puissant de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, maintenu en détention depuis son arrestation le 19 novembre, qui semble désormais ne plus pouvoir échapper à un procès. Ghosn avait déjà été mis en examen le 10 décembre pour avoir minoré ses revenus de 5 milliards de yens (environ 40 millions d'euros) dans des rapports financiers annuels de Nissan de 2010 à 2015. Il est désormais mis en examen pour avoir poursuivi cette pratique sur les trois derniers exercices financiers, de 2015 à 2018, pour un montant de 4 milliards de yens (environ 32 millions d'euros). Le troisième chef d'accusation, pour «abus de confiance aggravé», concerne un stratagème grâce auquel Ghosn aurait fait passer dans les comptes de Nissan des pertes sur des investissements personnels lors de la crise de 2008. La somme incriminée s'élève cette fois à 1,85 milliard de yens (environ 15 millions d'euros).

Mardi à Tokyo, lors de sa première comparution devant un juge, le dirigeant avait clamé son innocence. «J'ai été accusé à tort et détenu injustement sur la base d'accusations sans valeur ni fondement», avait-t-il affirmé. Mais le plaidoyer n'a apparemment pas convaincu le juge.

Côté français, Renault a certes assuré hier qu'aucune fraude n'avait été constatée sur la rémunération des principaux dirigeants en 2017 et 2018, y compris pour celui qui est toujours son PDG. Mais la pression monte aussi à Paris sur la direction de Renault et l'Etat français (actionnaire à 15 % du constructeur automobile) depuis que Libé a révélé que Ghosn n'était plus résident fiscal français depuis 2012, et s'était domicilié aux Pays-Bas afin d'échapper à l'ISF. Selon Reuters, il se serait aussi arrangé pour accorder un bonus de 500 000 euros à une de ses fidèles, Mouna Sepehri, directrice déléguée à la présidence de Renault. Le versement se serait fait via la holding néerlandaise Renault-Nissan BV, à l'insu du conseil d'administration, comme le suspectait la CGT. Ainsi, le maintien de Ghosn à la tête de Renault pose de plus en plus question.

A Tokyo, le parquet pourrait infliger à Ghosn un nouveau motif d’arrestation. Il serait alors replacé en garde à vue pour quarante-huit heures, extensible deux fois dix jours, à condition que le tribunal donne son approbation. L’accusation d’abus de confiance est considérée comme particulièrement grave et Motonari Otsuru avait déjà admis qu’une remise en liberté sous caution serait peu probable si les procureurs décidaient de l’inculpation. Or, selon l’avocat, il pourrait s’écouler six mois avant un procès.