On a du mal à imaginer, à cause de la sécheresse des chiffres, l’étendue du désastre économique et social traversé par le Venezuela. Un seul d’entre eux résume beaucoup de choses : les Vénézuéliens ont perdu en moyenne 11 kilos depuis le début de la crise. Tout est à l’avenant, effondrement du PIB, inflation dantesque, mortalité infantile en hausse, pénurie de médicaments, gonflement subit du nombre d’habitants en dessous du seuil de pauvreté. Il faut se reporter aux situations de guerre ou bien de conflit civil pour retrouver des statistiques comparables. Certes, la chute des cours du pétrole explique en partie le cataclysme. Mais n’était-ce pas le devoir de tout Etat de se prémunir contre une baisse des recettes pétrolières qui n’avait rien d’invraisemblable ? Et de s’assurer, au moins, que la compagnie nationale n’allait pas, en plus, réduire sa production faute d’investissements ou de simple entretien du matériel ? Dans n’importe quelle démocratie, le gouvernement qui aurait provoqué, ou même vu, la dégradation de l’économie à ce point aurait cédé la place depuis longtemps, à juste raison. D’où le geste mi-légal mi-expéditif du Parlement régulièrement élu, qui a prononcé la déchéance du Président, dont on estime qu’il a été élu dans des conditions illégitimes. D’où le bras de fer déclenché à propos de l’aide humanitaire acheminée au Venezuela par des gouvernements étrangers hostiles à Maduro. Juan Guaidó, président par intérim autoproclamé, veut accueillir l’aide, l’autre président la refuse, prétextant de la menace d’une intervention étrangère. On l’a déjà écrit : il n’est d’autre moyen de sortir de cette confrontation - qui risque de déboucher sur une guerre civile - que de convoquer une élection présidentielle sincère et contrôlée. Tout le reste est palinodie et atermoiement tactique.
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