Peu francophile contrairement à ses deux prédécesseurs Jean Paul II et Benoît XVI, le pape François a, ces jours-ci, de sérieux soucis avec la France. Recevant, ce lundi matin en audience privée, le cardinal-archevêque de Lyon, Philippe Barbarin, il va devoir trancher en acceptant ou non la démission du prélat.
«Catastrophe»
Figure catholique très influente en France, le primat des Gaules a été condamné le 7 mars dernier à six mois de prison avec sursis pour ne pas avoir signalé à la justice les agissements pédocriminels de l'abbé Bernard Preynat. Dans la foulée, il a fait appel de ce jugement. «Ce serait une catastrophe pour l'Eglise de France si le pape décidait de suspendre sa décision jusqu'au procès en appel», affirmait, il y a quelques jours, sous couvert d'anonymat, une source proche de l'épiscopat.
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De fait, les évêques français qui doivent se réunir, début avril à Lourdes, sont pressés de tourner la page de l’affaire Preynat-Barbarin, devenue le symbole de l’omerta dans l’église au sujet des scandales d’abus sexuels. A Rome, il semblerait, selon des sources proches de l’entourage du pape, que François ne l’entende pas de cette oreille, laissant planer de fortes incertitudes sur la décision qu’il prendra. Le chef de l’Eglise catholique a beaucoup d’estime pour Philippe Barbarin dont il a déjà refusé la démission en 2016. Il serait enclin à penser, selon une source à Rome, que Philippe Barbarin fait figure de bouc émissaire.
Selon le quotidien lyonnais le Progrès, les avocats de l'archevêque auraient transmis au pape, une note en espagnol (la langue natale de François) pour «démontrer la fragilité du jugement» et «mettre en avant les chances de relaxe en appel».
La bataille fait manifestement rage en coulisses. Epuisé, l'archevêque de Lyon serait, lui, déterminé à abandonner sa charge «pour le bien de l'Eglise», selon son entourage. Une décision qu'il aurait prise avant le rendu du jugement du tribunal correctionnel de Lyon.
Levée de boucliers
Avec la France, le pape François a une autre affaire très épineuse sur les bras, celle du nonce apostolique (son ambassadeur) Luigi Ventura, sous le coup de quatre plaintes pour attouchements sexuels. Le parquet de Paris a demandé la levée de l’immunité diplomatique qui empêche, pour le moment, l’audition de Ventura. La procédure va prendre du temps, devant transiter par le ministère de la Justice et le Quai d’Orsay pour être transmise au Saint-Siège.
La demande risque fort d'embarrasser le Vatican aux prises avec une crise mondiale liée aux scandales des abus sexuels commis au sein de l'Eglise catholique. «Il est peu probable que Rome livre le nonce à la justice française», affirme une source proche de la curie romaine. Cependant, un refus provoquerait sûrement une levée de boucliers en France et ferait perdre un peu plus de crédit à l'Eglise catholique qui affiche désormais une volonté de tolérance zéro à l'égard des abus sexuels.