Le temps est une denrée précieuse pour les pays musulmans, qui doivent s’adapter aux contraintes ramadanesques, au point de remanier tout le fonctionnement de leurs sociétés jusque dans le monde du travail. Pour avoir tout au long de ce mois un rythme de vie plus allégé et compatible avec le jeûne, certains optent pour différents aménagements notamment au niveau du travail et du changement d’heure. Tour d’horizon des dispositifs mis en place pour faire face au ralentissement général de toutes sortes d’activités.
Changement d’heure à l’échelle nationale
Pendant toute la période du ramadan, tout au long du mois de mai et jusque début juin, le Maroc va tricher en reconfigurant ses aiguilles sur l'heure GMT conformément à la décision du ministère des Habous et des Affaires islamiques. Ce qui fait économiser aux Marocains une heure de jeûne. Le Maroc reviendra ensuite à l'heure d'été (GMT+1) puisque le pays a décidé de ne plus changer d'heure en été et en hiver depuis le mois d'octobre.
Baisse de l’activité professionnelle, changement d’horaires de travail
Toujours au Maroc, le ministère de la Réforme de l'administration et de la Fonction publique a annoncé divers changements d'horaires de travail : par exemple, les administrations publiques et les collectivités locales ou encore les établissements publics adoptent l'horaire continu de 9 heures à 15 heures. Dans cette même mouvance, la Tunisie, elle, veut que ses fonctionnaires pointent de 8 heures à 14h30 du lundi au jeudi et de 7h30 à 13 heures le vendredi.
Les pays du Golfe poussent cet effort encore plus loin. Ainsi, le ministre de l'Education des Emirats arabes unis a fait publier une circulaire annonçant que ses employés du ministère et ceux des organismes du gouvernement ne travailleront plus que de 9 heures à 14 heures. A noter que la réduction du temps de travail touche aussi beaucoup les entreprises privées même si elles le font de façon moins formelle. On retrouve des recours du même ordre dans des pays comme la Tunisie ou l'Algérie…
Ce genre d'initiatives s'accorde avec une réalité, la baisse de productivité générale. A titre d'exemple, selon la dernière enquête du Haut-Commissariat au plan parue en 2015 sur la vie quotidienne des Marocains, en plein ramadan, ceux-ci consacrent en moyenne quarante-six minutes de moins que d'ordinaire à leur travail (-23%). Cette réduction est de 1h12 minutes pour les hommes et de 19 minutes pour les femmes. A contrario, le temps des activités domestiques s'allonge, essentiellement pour les femmes (+47 minutes) même si les courses sont tout autant menées par les hommes.
Au niveau de la répartition des repas : 96% de Marocains adultes prennent leur «ftour» (le repas de rupture du jeûne) aux alentours de 20 heures, 29% le dîner à 23 heures environ et 54% le «shour» (une collation que prennent les jeûneurs juste avant l'aube) vers 3h30. Le temps consacré au sommeil baisse en moyenne de trente-sept minutes.
Fermeture des restaurants et des cafés
Les cafés et les restaurants sont fermés en plein jour, dans le royaume, afin de dissuader les non-jeûneurs de consommer au sein de l'espace public y compris dans des lieux discrets. En effet, est puni d'emprisonnement allant d'un à six mois et d'une amende de 200 à 500 dirhams (près de 20 à 50 euros) «celui qui, notoirement connu pour son appartenance à la religion musulmane, rompt ostensiblement le jeûne dans un lieu public pendant le temps du Ramadan, sans motif admis par cette religion», selon l'article 222 du code pénal marocain qui remonte à 1961, soit quelques années après l'indépendance du royaume.
Du côté tunisien, c'est une circulaire datée de 1981 qui décrète la fermeture obligatoire des restaurants même s'il n'existe pas de loi criminalisant la rupture du jeûne. De même qu'en Algérie, où des magasins de nourriture et de débit de boissons se retrouvent contraints de fermer sans aucun fondement.
Les contraintes impulsées par le mois de ramadan sont tout autres en Arabie Saoudite où le ministère de l’Intérieur impose le respect du jeûne sur la place publique à tous, y compris à ses résidents étrangers non musulmans, sous peine d’expulsion.