L’Indonésie a organisé des élections historiques le 17 avril : 192 millions de personnes ont été appelées aux urnes pour élire un ticket présidentiel, renouveler les deux Chambres du Parlement et désigner les membres d’assemblées locales. Au total, 245 000 candidats ont été départagés dans quelque 800 000 bureaux. Pour cela, 7 millions de volontaires ont été mobilisés pour dépouiller à la main les bulletins et organiser le vote. Un mois après le scrutin, plus de 500 personnes qui ont organisé et dépouillé le vote sont décédées. Selon un communiqué du ministère de la Santé indonésien publié jeudi, 11 239 autres sont malades.
Selon le porte-parole de la Commission des élections générales (KPU), ces personnes sont mortes d'épuisement. Plusieurs articles de presse racontent, en effet, que ces travailleurs ont été réquisitionnés pendant au moins vingt heures d'affilée en moyenne le jour du dépouillement, et «ils sont nombreux à avoir dépassé les vingt-quatre heures».
Pour le Pr Jesse Hession Grayman, de l'université d'Auckland en Nouvelle-Zélande, qui travaille sur les politiques de santé publique en Indonésie, ce chiffre de 500 morts sur 7 millions a beau être impressionnant, il resterait dans la fourchette du taux de décès des travailleurs indonésiens. Il s'interroge d'ailleurs sur le fait de savoir «à partir de quand on doit cesser d'attribuer ces morts à leur épuisement lié aux élections, quand le travail le plus dur était il y a plus de trois semaines».
Selon le président de l'association des médecins indonésiens, cité par le Jakarta Post, «l'épuisement n'est probablement pas la cause de leur mort. Cependant, un état de fatigue peut déclencher et exacerber d'autres problèmes de santé. De nombreux scrutateurs souffraient en fait de problèmes cardiaques, d'hypertension, de diabète et d'autres maladies qui ont été aggravées par le manque de sommeil, d'eau et par un environnement de travail malsain». Les personnes décédées étaient âgées de 50 à 70 ans. Pour le ministère de la Santé, l'épuisement n'est pas non plus le seul facteur à l'origine de ces décès. Face à la polémique, plusieurs enquêtes ont été lancées.