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Européennes

En Italie, Salvini rafle la mise

La Ligue du dirigeant d'extrême droite remporte près de 34% des suffrages et s'impose largement face à son allié du Mouvement Cinq Etoiles, notamment dans d'anciens bastions communistes. Il trônera en force au Parlement européen.
Le vice-Premier ministre italien et ministre de l'Intérieur, lors de sa conférence de presse post-résultats, dimanche à Milan. (Photo Miguel Medina. AFP)
par Eric Jozsef, correspondant à Rome
publié le 27 mai 2019 à 8h06

C'est avec un rosaire en main et en remerciant «celui qui est là, au-dessus» d'«avoir aidé l'Italie et l'Europe» que Matteo Salvini s'est présenté dimanche soir devant la presse dans son costume de grand vainqueur des élections européennes. Avec près de 34% des suffrages, le leader de la Ligue a en effet confirmé son statut de nouvel homme fort de l'extrême droite continentale.

En moins d'un an, et par rapport aux législatives de 2018, le parti du ministre de l'Intérieur a doublé son score. «C'est un succès incroyable, s'est-il félicité. Il y a seulement cinq ans, les journaux parlaient d'une Ligue en voie d'extinction et aujourd'hui nous sommes le premier parti au nord et au sud. Nous avons obtenu plus de 50% des voix dans de nombreuses villes.» Dans ses bastions septentrionaux de Lombardie et de Vénétie, la Ligue dépasse les 40% mais elle s'impose aussi dans les anciennes terres rouges d'Emilie-Romagne et de Toscane, où elle sort en tête avec un tiers des suffrages. Même dans le Sud, Matteo Salvini, qui il y a encore quelques années traitait les méridionaux de «culs-terreux», recueille près de 25% des voix.

Hémorragie

L’exercice du pouvoir a ainsi provoqué en Italie un basculement presque parfait. Car si la Ligue a progressé de manière fulgurante (aux dépens notamment de son ancien allié Berlusconi, dont le parti Forza Italia tombe à 8%), le M5S a lui presque divisé son score par deux, passant de 32,7% l’an dernier à moins de 18% dimanche, derrière le Parti démocrate qui s’est un peu relancé avec 22% des voix.

Les mesures sociales comme le revenu de citoyenneté n'ont visiblement pas permis d'arrêter l'hémorragie constatée au cours des derniers mois lors d'élections administratives partielles. Il n'y a que dans le Mezzogiorno que le M5S résiste partiellement et demeure en tête (30% des voix). Pour le reste, c'est une sévère claque pour le mouvement de Luigi Di Maio qui a préféré, à l'instar de tous les dirigeants M5S, ne faire aucun commentaire. Matteo Salvini leur a tendu la main. Mais à ses conditions.

«Mes alliés, mes amis»

Alors que dans les dernières semaines, les rapports entre la Ligue et le M5S s'étaient réduits à des insultes, des menaces et des invectives sur tous les sujets, le ministre de l'Intérieur a cherché dimanche soir à renouer le dialogue : «Mes alliés au gouvernement sont mes amis.» Il a promis qu'il n'utilisera pas ces résultats pour «des règlements de comptes internes» et a appelé ses partenaires à se «remettre au travail dans la sérénité». Mais dans le même temps, il a laissé entendre qu'il sera désormais le patron de la majorité.

Matteo Salvini a ainsi demandé une «accélération» du programme de gouvernement sur les thèmes qui sont pour lui prioritaires – comme la baisse des impôts, les infrastructures (comme la liaison ferroviaire Lyon-Turin), de nouvelles mesures contre l'insécurité et le renforcement de l'autonomie régionale – mais qui sont difficiles à avaler pour le M5S. Reste que le mouvement n'a pas véritablement d'alternative. Si ce n'est de choisir de mettre fin à l'expérience avec la Ligue pour retourner, très affaibli, devant les électeurs.