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Libération
Défaite

En Grèce, le coup de poker perdant d'Aléxis Tsípras

Dimanche, au soir du deuxième tour des élections municipales et régionales, la gauche grecque a été balayée par la vague bleue de la droite conservatrice.
Aléxis Tsípras dans l'isoloir, dimanche. (Photo Costas Baltas. Reuters)
par Fabien Perrier, correspondant en Grèce
publié le 3 juin 2019 à 15h18

Aléxis Tsípras le Premier ministre grec, a perdu son énième coup de poker. A l’issue du deuxième tour des élections municipales et régionales dimanche, la carte de la Grèce est recouverte de bleue, couleur du principal parti d’opposition (Nouvelle démocratie, droite). 12 des 13 régions sont désormais dans ses mains. Seule la Crête, la plus grande île grecque, reste en rose et vert. Et encore, c’est grâce une alliance entre le parti social-démocrate Pasok et celui de la gauche grecque, Syriza, au pouvoir depuis janvier 2015. La capitale Athènes et Thessalonique, la deuxième ville du pays, sont elles aussi dans l’escarcelle de ND. Patras, la troisième plus grande ville, est prise par le KKE, le parti communiste grec très dogmatique qui voue une détestation viscérale à Syriza et son leader, Tsípras.

Le Premier ministre avait transformé la campagne électorale en un duel avec Kyriákos Mitsotákis, à la tête de ND, tout en mettant en avant son bilan: il a essuyé une défaite cinglante. Il a annoncé, le 26 mai au soir, la tenue d'élections anticipées, espérant sauver les meubles : il n'en est rien. «Syriza a mis en place une stratégique perdante, estime Vangelis Lagos, sociologue à l'université Panteion. Après dix années d'austérité, il était impossible de convaincre l'électorat rien qu'en affirmant : "ND est pire que nous !" Cette comparaison, négative, éliminait complètement la question des politiques européennes…»

C'est pourtant d'elles dont a souffert le gouvernement. Six mois après son arrivée au pouvoir en 2015, Aléxis Tsípras est contraint de signer un troisième «mémorandum», un accord avec l'Union Européenne imposant les réformes à mener dans le pays. Il tourne ainsi le dos à ses promesses de campagne et doit à son tour appliquer l'austérité. Depuis août 2018, le gouvernement a certes tenté d'appliquer quelques mesures comme le rétablissement des conventions collectives, la suppression du «smic jeune» et la hausse concomitante du salaire minimum, des baisses de taxes… il n'a pas convaincu. «Mais où en est la réorganisation de la production et de l'économie grecques ?» interroge Vangelis Lagos. Alexis Tsipras et son équipe espéraient sans doute un deuxième mandat pour s'y atteler. Le pari pourrait bien être perdu à l'issue des élections législatives du 7 juillet.