Des méduses échouées sur la plage. Ou pire, flottant, menaçantes, à la surface de l'eau. Ce scénario, redouté pas les vacanciers, semble se généraliser. Dernière invasion en date, des physalies (espèce de cnidaires, proches des méduses) ayant piqué des milliers d'Australiens en janvier. À l'occasion de la Journée mondiale des Océans célébrée le 8 juin, les scientifiques pointent la responsabilité de l'être humain qui, entre la surpêche et les structures qu'il implante dans les mers, contribue à l'augmentation du nombre de méduses. Tout en s'avérant incapable d'enrayer ce phénomène.
La prolifération de ces animaux se révèle d'abord due à leur mode de reproduction atypique, à la fois sexué à l'âge adulte mais aussi asexué quand ils se trouvent encore à l'état de polype, et se clonent en quelque sorte. «Un individu peut alors produire des milliers de méduses», explique Lucas Leclère, chercheur au CNRS et auteur principal d'un article récemment publié dans la revue Nature Ecology and Evolution sur le génome des méduses. Ceci étant, il a toujours existé des périodes avec une multiplication plus ou moins importante de ces animaux. «Même les Grecs anciens ont témoigné de grandes proliférations de méduses», affirme Lucas Leclère. Or, si les périodes de prolifération avaient lieu «habituellement tous les 5-6 ans», le chercheur au Laboratoire d'océanographie de Villefranche-sur-Mer Fabien Lombard observe «depuis 1993, une présence continue de méduses.»
La surpêche en cause
Cette hausse de la prolifération ou «boom» de méduses est localisée dans certaines régions du globe, comme en mer de Chine, en mer Noire, dans les eaux namibiennes et au large de l'Alaska, tandis que leur nombre décroît dans d'autres zones. Les scientifiques mettent aussi en garde contre l'idée largement répandue du lien entre cette augmentation et le réchauffement des océans, alors que ce phénomène peut même agir en la défaveur de certaines espèces. Ils accusent par contre la surpêche qui, en réduisant les stocks d'animaux marins, «laisse davantage de plancton aux méduses», résume le chercheur du CNRS Lucas Leclère.
L'anthropisation des océans − c'est-à-dire la transformation des océans par l'homme − tient également sa part de responsabilité, car «les méduses se développent plus facilement sur des surfaces neuves», explique le chercheur Fabien Lombard. Il cite le cas d'une ferme aquacole qui, une fois retirée, a permis de réduire la population de ces animaux. Cependant, la plupart du temps, l'homme n'a plus aucun rôle à jouer une fois la prolifération avérée. Le chercheur invite d'ailleurs à ne pas tenter d'éliminer les méduses au risque de voir une nouvelle espèce invasive les remplacer. Il suggère plutôt de «laisser l'écosystème s'autoréguler». En attendant, il conseille aux amateurs d'eau salée de se munir d'un masque pour les repérer et éviter les piqûres.