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Libération
Éditorial

Survie

publié le 29 juillet 2019 à 21h16

C'était hier. Que sera demain ? Depuis hier, la terre vit à crédit. En deux cent dix jours, l'humanité a consommé plus de ressources naturelles que la planète ne peut en générer sur une année entière. D'où l'expression du «jour du dépassement», qui arrive chaque année toujours plus tôt. Il y a quarante ans, il tombait à l'orée de l'hiver… L'efficacité marketing de l'expression, sa puissance symbolique n'enlèvent rien à la réalité de ce qu'elle évoque : le pillage à grande échelle des ressources naturelles auquel se livre l'homme qui, ce faisant, épuise la terre à force d'y puiser, scie la branche sur laquelle il est assis, court à sa perte les yeux fermés. Les théories de fin du monde sont aussi vieilles que les civilisations. Elles ont inspiré les esprits les plus brillants et imaginatifs, artistes, écrivains, cinéastes, auteurs de BD… Elles ont aussi nourri une littérature complotiste ou survivaliste nauséabonde. Depuis une quarantaine d'années et les travaux sur les limites de la croissance, cette théorie de l'effondrement s'appuie sur des recherches scientifiques qui laissent peu de place au doute : entre l'épuisement des ressources naturelles, le réchauffement climatique et la menace sur la biodiversité, l'humanité se débat dans un triangle infernal qui pose la question de sa survie. Symbole médiatique de cette théorie de la collapsologie : Greta Thunberg et son message lancé à la face adulte de l'humanité. «Nous ferons nos devoirs [à l'école] quand vous ferez le vôtre [sauver la planète] A quoi bon sinon… La réflexion qui s'impose à nous mérite mieux que les anathèmes conservateurs visant la jeune Suédoise entendus ces dernières semaines. Le vrai défi va consister, pour les scientifiques, philosophes, économistes, ingénieurs, grands patrons et dans leur sillage les dirigeants politiques, à inventer la révolution industrielle du XXIe siècle. La lumière du progressisme comme réponse aux oiseaux de mauvais augure.