Dans une courte allocution solennelle, lundi matin depuis la Maison Blanche, Donald Trump a taxé de «crimes contre l'humanité» les tueries de masse qui ont ensanglanté les Etats-Unis ce week-end. «Notre nation doit condamner le racisme, l'intolérance et le suprémacisme blanc d'une seule voix», a-t-il affirmé. Le Président a lu son discours sur un téléprompteur, ce qui ne l'a pas empêché de se tromper dans le nom des villes endeuillées. Deux fusillades, en l'espace d'à peine treize heures, dans un centre commercial d'El Paso (Texas) puis dans le centre-ville de Dayton (Ohio), sans lien mais perpétrées par deux hommes blancs et citoyens américains, ont coûté la vie à 31 personnes, et en ont blessé plus d'une cinquantaine d'autres.
Les autorités fédérales traitent la tuerie d'El Paso comme un acte de «terrorisme intérieur», et enquêtent sur les motivations racistes et haineuses du tireur. Celui-ci est en effet soupçonné d'être l'auteur d'un manifeste anti-immigrés, posté sur Internet peu avant la tuerie, annonçant une attaque «en réponse à l'invasion hispanique du Texas». Sept des 22 personnes tuées à El Paso sont Mexicaines.
«Perturbés». L'apparente fermeté de Trump lors de son discours n'a pas fait taire ses adversaires démocrates, qui l'accusent d'attiser le racisme et l'intolérance. Les points communs ne manquent pas entre le lexique du manifeste du tireur d'El Paso et la rhétorique présidentielle. Une publicité de campagne pour sa réélection en 2020, postée sur Facebook, appelle par exemple à «stopper l'invasion» des immigrés clandestins dans le pays. En juillet, il avait enjoint quatre élues démocrates à la Chambre, issues de minorités, à «retourner» dans leur pays d'origine.
Donald Trump n’a pas non plus fait d’annonce de réformes sur le contrôle des armes, dont il n’est pas partisan. Reflétant les positions de sa base conservatrice, l’homme se présente depuis son entrée en politique comme un fervent défenseur du deuxième amendement de la Constitution, qui garantit à tout citoyen américain le droit de porter des armes. Le Président est soutenu par le puissant lobby des armes, la National Rifle Association (NRA), qui a dépensé 30 millions de dollars (26 millions d’euros) pour sa campagne en 2016 (soit trois fois plus que pour son prédécesseur en 2012).
Le locataire de la Maison Blanche s'est donc contenté de réitérer son soutien à une application plus stricte et plus rapide de la peine de mort pour les auteurs des tueries de masse. Il a une nouvelle fois choisi de pointer du doigt les médias, accusés de nourrir «la colère et la rage» des Américains. Mais aussi les jeux vidéo, qui «idéalisent la violence», ou encore Internet, comme causes de ces fusillades, responsables selon lui d'avoir radicalisé des «esprits perturbés». «C'est la maladie mentale et la haine qui appuient sur la gâchette, pas les armes», a-t-il répété. Il a seulement annoncé, sans les détailler, des «réformes des lois de santé mentale pour mieux identifier les personnes qui sont déséquilibrées» et «faire en sorte que ces personnes n'aient pas accès aux armes à feu».
Veto. Trump n'est pas revenu sur sa proposition, faite quelques heures plus tôt sur Twitter, d'encadrer davantage les ventes d'armes. Suggérant, sans logique apparente, de lier cette mesure à la réforme migratoire qu'il tente, en vain, de faire avancer au Congrès depuis des mois. «Les républicains et les démocrates doivent se rassembler et obtenir des vérifications d'antécédents robustes, peut-être en couplant cette loi à une réforme migratoire désespérément nécessaire», avait-il ainsi posté.
Dans le sillage d’autres tueries, le président américain avait déjà appelé à renforcer les contrôles d’antécédents de personnes voulant acquérir des armes à feu. En février, la Chambre des représentants, à majorité démocrate, avait voté une législation bipartisane imposant des vérifications d’antécédents à l’échelle fédérale pour toutes les ventes et reventes d’armes, et un second texte permettant aux autorités de prendre jusqu’à dix jours pour effectuer ces contrôles. Six mois plus tard, le Sénat, à majorité républicaine, n’a toujours pas commencé l’examen de ces textes, et la Maison Blanche a menacé d’utiliser son veto pour les bloquer, estimant qu’ils ne protègent pas suffisamment les droits des propriétaires d’armes.