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Libération
Billet

David Cameron, désolé mais pas trop

L'ex-Premier ministre britannique, qui publie ce jeudi ses mémoires, reste convaincu qu’un référendum sur le Brexit était inévitable.
David Cameron et Boris Johnson en juillet 2015 à Londres. (JACK TAYLOR/Photo Jack Taylor. AFP)
publié le 18 septembre 2019 à 19h36

Des regrets, il en a. Désolé, il l'est. Mille et une fois. Il le répète ad nauseam dans ses mémoires, For the Record (Harper Collins), qui paraissent ce jeudi. Trois ans et demi après le référendum sur le Brexit et son retrait de la politique, David Cameron ne regrette pas sa décision de demander aux Britanniques de se prononcer sur l'appartenance à l'UE. Il y a des accents de Sinatra dans les mots de l'ex-Premier ministre. «Regrets, I've had a few… I did, what I had to do… My way» («Des regrets… J'en ai quelques-uns, j'ai fait ce que je devais faire… A ma manière»). Il reste convaincu qu'un référendum était inévitable. Il reconnaît une campagne calamiteuse, avoir mal «vendu» l'UE - officiellement en faveur du «remain», il ne le défend à aucun moment dans son livre - mais c'est tout. Il blâme les traîtres, Johnson d'abord, «qui n'a jamais cru au Brexit» et qui «a risqué un résultat auquel il ne croyait pas pour faire avancer sa carrière». Et puis son ex-ami de vingt ans, Michael Gove, devenu avec Johnson les «ambassadeurs du monde post-vérité».

Cameron est attristé par la situation de son pays : des amitiés brisées, un Parti conservateur implosé, un Parlement divisé et réduit au silence, un Premier ministre dont la justice étudie en ce moment s’il a menti à la reine et un Royaume-Uni dont la division est évoquée comme une éventualité crédible. Il y pense tous les jours, mais ne va pas plus loin. Dans son livre, dont les profits iront à des organisations caritatives, il n’endosse jamais les conséquences de ses actes. Que le programme d’austérité mis en place après son élection en 2010 ait pu jouer un rôle dans le résultat du référendum n’est pas évoqué. Comme si le fait que le nombre de sans-abris et de gens ayant recours aux banques alimentaires ait doublé sous sa législature était une conséquence malheureuse mais pas dramatique, et surtout inévitable. Lui-même vit de ses rentes, de discours grassement payés et d’une vice-présidence d’un fonds d’investissement.

Les seules pages qui résonnent sont celles sur son fils aîné, Ivan, atteint de graves troubles neurologiques et mort à 6 ans, en 2009. Finalement, le livre laisse sur sa faim. On aurait pu espérer un franc «j'ai vraiment déconné», on récolte un tiède «je suis désolé, mais ce n'est pas vraiment ma faute». Un détail fait sourire, jaune. Il révèle avoir repris la chasse et tirer sur des faisans ou des chevreuils. Avant de viser, il donne à ses cibles un nom. C'est invariablement «Boris» ou «Michael», selon les jours.