
Il est si banal qu'il échapperait presque à notre bonne conscience écologique. Pourtant, le papier toilette que l'on utilise – et jette – tous les jours sans réfléchir dans l'intimité du petit coin est loin d'être irréprochable. D'après le WWF, l'équivalent de 27 000 arbres est abattu tous les jours pour en fabriquer.
Et c'est sans compter l'impact sur notre santé des composés chlorés et autres substances chimiques qui assurent leur teinte blanche éclatante, ou encore des parfums, qui contiennent notamment des phtalates. Selon l'Anses, même les rouleaux produits à partir de papier recyclé sont susceptibles de comporter des traces de bisphénol A, un perturbateur endocrinien présent dans les encres d'imprimerie.
Bien sûr, il est possible de tout simplement s'en passer. Les adeptes les plus stricts du zéro déchet s'en remettent, comme pour les couches et les serviettes hygiéniques, à son alternative en tissu, lavable et réutilisable. D'autres préfèrent se rincer à l'eau, comme 70% des habitants de la planète (chaque utilisation du bidet consomme 0,6 litre d'eau, contre 168 litres pour la fabrication d'un rouleau de papier toilette). Mais pour ceux qui tiennent à leurs petites habitudes, des alternatives plus vertes existent.
Opter pour le recyclé
Cela paraît logique, l'impact environnemental des rouleaux issus de papiers recyclés (estampillés FSC-recyclé) est forcément inférieur à ceux que l'on produit à partir de fibres vierges. En plus d'épargner les forêts, révèle l'ONG Natural Resources Defense Council, il nécessite presque deux fois moins d'eau et de composés chimiques polluants pour sa production.
Quand le recyclé est issu de matières premières locales, c'est encore mieux. Chez Popee, par exemple, «le papier toilette se fabrique à partir de papier recyclé récupéré dans des corbeilles de bureaux d'entreprises normandes et bretonnes (dont la couleur, naturellement blanche, évite d'utiliser des produits chimiques comme le chlore pour le blanchir). Il est ensuite traité dans une usine spécialisée pour garantir sa non-toxicité, attestée par l'écolabel», explique sa fondatrice, Audrey Destang.
Emballé dans un film plastique recyclable cinq fois plus fin que les plastiques traditionnels (tout en visant le zéro plastique en 2020), ce papier disponible à l'achat en lots ou sur abonnement est donc 100% made in France. Ce qui ne va pas de soi, explique-t-elle : «Aujourd'hui, la matière première du papier toilette non recyclé vient pour la majeure partie de Scandinavie ou d'Amérique du Sud. Le papier recyclé, lui, vient d'Europe, mais la provenance de la matière première est souvent opaque.»
Fibres de bambou
Une autre solution écologique consiste à remplacer le bois ou le papier par du bambou. Comme plusieurs de ses concurrents anglo-saxons (Bippy, No.2, Cheeky Panda), la jeune pousse française Mima a préféré miser sur cette plante à la croissance ultrarapide. Made in China cette fois, puisqu'elle provient ici de fermes gérées par des coopératives dans la province du Sichuan. Contrairement à certaines plantations de bambou accusées de contribuer à la déforestation, «celle-ci est certifiée par le label FSC (exploitation durable)», assure Maxence Ruckli, cofondateur de cette start-up qui ambitionne également de planter un million d'arbres d'ici à 2025. Avant d'ajouter : «Cette ressource est présente en Asie depuis des millénaires, mais il est difficile d'en faire pousser en Europe.»
La fibre de bambou, par ailleurs, donne un papier à la fois doux et résistant, au toucher très «premium» : «C'est vraiment la Rolls-Royce du papier toilette, lance-t-il, tout en admettant ses défauts. Nous avons pensé à proposer du papier non blanchi, de couleur un peu sableuse, mais le marché n'est pas encore prêt. Je suis en train de voir si l'on pourra se passer complètement de composés chlorés, avec la méthode TCF [Totally Chlorine Free].»
Mais ces papiers de toilette écolo voient bien au-delà de leur fonction utilitaire. «L'objectif est aussi de faire quelque chose de décoratif, qu'on ne doit pas forcément cacher dans la salle de bain», fait valoir l'entrepreneur. Colorés et stylisés, ces emballages transforment notre perception de ce produit ordinairement si insignifiant. Avec le prix qui va avec : pour 24 rouleaux, comptez 36 euros chez Mima, et 29,90 euros chez Popee…