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Violences

Bolivie : la présidente annonce qu'elle convoquera des élections dès ce mercredi

Après les heurts qui ont fait huit morts mardi, la présidente par intérim Jeanine Añez a promis d’appeler rapidement ses concitoyens aux urnes. Depuis son exil au Mexique, l'ex-président Evo Morales a assimilé la répression des manifestants à un «génocide».
Des policiers anti-émeutes lors d'une manifestation de sympathisants de l'ancien président Evo Morales, le 15 novembre 2019 à Sacaba (Bolivie) (Photo STR. AFP)
publié le 20 novembre 2019 à 21h04
(mis à jour le 20 novembre 2019 à 21h24)

Les heurts survenus mardi entre partisans de l’ex-président Evo Morales et les forces boliviennes près d’une raffinerie non loin de La Paz ont fait huit morts, selon un nouveau bilan communiqué mercredi par le parquet. Les échauffourées ont éclaté alors que l’armée et la police dégageaient l’usine de combustible située à El Alto que des manifestants occupaient depuis la semaine dernière pour faire pression sur la présidente par intérim Jeanine Añez et exiger sa démission.

Ce nouveau bilan porte à 32 le nombre de personnes tuées dans les violences qui secouent le pays sud-américain depuis la présidentielle controversée du 20 octobre qu'Evo Morales avait affirmé avoir remportée. Sous la pression de la rue et après avoir été lâché par l'armée, Evo Morales a fini par démissionner le 10 novembre et est parti se réfugier au Mexique. Le départ d'Evo Morales, premier président indigène de Bolivie, a entraîné des manifestations quasi quotidiennes de ses partisans qui crient au «coup d'Etat».

Pour tenter de «pacifier» la Bolivie, Jeanine Añez a promis d'appeler rapidement ses concitoyens aux urnes. «Si Dieu le veut, aujourd'hui, dans la matinée, nous allons convoquer les élections, comme le réclame tout le pays», a-t-elle déclaré mercredi à la presse. Jeanine Añez, qui était jusque-là sénatrice d'opposition, a demandé au Parlement d'approuver une loi pour organiser des élections présidentielles et législatives. S'il est approuvé, le texte annulerait le scrutin du 20 octobre, à l'issue duquel Evo Morales s'était proclamé réélu, et permettrait la mise en place d'un nouveau Tribunal suprême électoral, a indiqué Jeanine Añez lors d'une conférence de presse. Depuis Washington, l'Organisation des Etats américains (OEA) a approuvé une résolution appelant à la tenue «en toute urgence» de nouveaux scrutins au Bolivie.

«Génocide»

Les heurts les plus violents ont eu lieu à Cochabamba (centre), fief de Morales, où neuf personnes ont été tuées dans des affrontements avec la police et l'armée. Depuis son exil mexicain, Evo Morales a appelé la communauté internationale à mettre fin à la répression des manifestants, une répression qu'il a assimilée à un «génocide».

«Je lance un appel à la CIDH (Commission interaméricaine des droits de l'Homme), à l'ONU pour qu'elles dénoncent et freinent ce massacre de frères indigènes qui demandent la paix, la démocratie et le respect de la vie dans les rues», a écrit sur Twitter le premier président indigène de son pays. «Après le coup d'Etat, nous avons près de 30 morts, ce massacre fait partie d'un génocide en cours dans notre chère Bolivie», a également déclaré l'ex-président lors d'une conférence de presse à Mexico, où il a reçu l'asile politique. «Ils tuent mes frères et mes sœurs», a-t-il ajouté.

«Tout bloquer»

Dans la matinée de mercredi, le ministre de l'Intérieur Arturo Murillo a diffusé devant la presse l'enregistrement d'une conversation téléphonique qu'il a présentée comme étant celle d'Evo Morales s'adressant à un leader du mouvement de protestation. «Ne laissez aucune denrée alimentaire dans les villes, nous allons tout bloquer et encercler» les villes, dit la voix qu'Arturo Murillo attribue à l'ancien président.

Cet ordre, a poursuivi le ministre, «est un crime contre l'humanité». «Dans les prochaines heures, nous allons porter plainte devant les instances internationales», a-t-il averti. Une pénurie d'aliments se fait sentir dans les magasins et les restaurants de La Paz en raison des blocages de routes qui mènent aux régions agricoles de la Bolivie, dans le centre et l'est du pays. Depuis le déblocage de la raffinerie de Senkata, une cinquantaine de camions-citernes ont pu aller approvisionner les stations-service de La Paz et de sa région. Parallèlement, le gouvernement intérimaire participe à un dialogue initié lundi par l'Eglise qui réunit tous les partis et la société civile. Rien n'a encore filtré de ces pourparlers.