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Libération
Chronique «A l'heure arabe»

Le Canada, nouvelle terre d'Eldorado pour les Marocains

A l'heure arabedossier
Toutes les semaines, chronique de la vie quotidienne, sociale et culturelle dans les pays arabes.
Une photo aérienne de Montréal, en juin 2019. (SEBASTIEN ST-JEAN/Photo Sébastien St-Jean. AFP)
publié le 30 novembre 2019 à 15h15

Les Marocains auraient choisi une nouvelle terre de prédilection, assez inattendue vu la distance qui les sépare, après avoir longtemps convoité certains pays d’Europe.

De plus en plus de CSP+ Marocains, ayant souvent un pied dans le monde professionnel, visent désormais le Canada pour concrétiser leurs envies d’ailleurs. Dans un pays où l’insécurité, les inégalités sociales et de genre sont criantes, le Canada apparaît comme une terre de salut.

«Tout notre entourage veut se barrer au Canada»

Pour un couple de jeunes trentenaires marocains vivant dans l’illégalité en concubinage et à l’insu de leurs propres familles, les relations sexuelles hors mariage étant passibles de prison, partir devient primordial pour leur liberté ainsi que leur intimité.

«Tout notre entourage veut se barrer au Canada», nous confiait Rania au mois d'octobre dans un appartement qu'elle est censée occuper seule comme le stipule le contrat de bail. «Je suis rentrée au Maroc après plusieurs années d'études en France pour me prouver que j'en étais capable. Je le suis toujours, mais je n'en ai plus envie. Le Maroc a l'air stable pour l'instant, je ne lui donne pas dix ou quinze ans avant que ça pète. Il y a une grande frustration et aucune politique publique capable d'y répondre», disait celle qui envisage sérieusement avec son compagnon de s'installer au Canada, après avoir passé de longues années d'études en France. Parmi ses critères de choix, elle évoque le climat social plus apaisé, selon elle, vis-à-vis des étrangers de confession musulmane.

Ce phénomène est relativement récent, selon des cabinets de conseil sur l'immigration, comme en témoigne une enquête réalisée par le magazine d'informations Telquel. Depuis trois ans, des cadres dont le salaire équivaut à 5 000 euros et plus manifesteraient l'intention de quitter dans les mois à venir le royaume pour le pays de l'érable.

Ontario, province la plus prisée des Marocains

Et ce serait la nouvelle procédure initiée au Canada en janvier 2015, «Entrée-express», qui aurait ouvert les vannes, promettant une réponse dans l'année. Pour les candidats à l'émigration vers l'Ontario – la destination la plus prisée par les Marocains –, les travailleurs doivent être francophones et anglophones, avec le baccalauréat en poche, une expérience de travail d'au moins un an et des économies pour pouvoir s'installer.

En ce qui concerne les motifs de départ du royaume, les agressions dans les rues, le climat social délétère mais aussi la cherté du système de santé et de l’école privée, devenue indispensable face à l’échec de l’éducation dans le public, reviennent souvent dans les discussions. Au niveau culturel, l’état d’esprit anglo-saxon au Canada induirait une meilleure intégration des immigrés, jugée plus favorable et moins assimilationniste qu’en Europe. Enfin, si le Maroc affiche un taux de chômage de près de 10 % au niveau national, le Canada tourne autour des 5%.