L’œil dans une loupe de bijoutier, un homme aux papillotes luxuriantes époussette des citrons oblongs, avant de les ranger dans un caisson en mousse. Un autre religieux, en redingote, inspecte sévèrement son fruit, le temps de mûrir son achat.
Chaque automne, sous ce préfabriqué en bordure d'un verger d'agrumes, des Juifs ultraorthodoxes de tout le pays viennent se fournir en cédrats, fruit sacré de la fête de Souccot, et dont la perfection est recherchée. «Nos plus beaux se vendent en magasin environ 500 shekels [130 euros]», s'enthousiasme Daniel Rosenthal, jeune rabbin de Kfar Habad. Cette ville de 6 500 habitants, à vingt minutes de route de Tel-Aviv, est la capitale israélienne du puissant mouvement Habad-Loubavitch (les deux appellations sont interchangeables), l'une des trois plus grandes dynasties hassidiques au monde.
«Vous voyez, tous les agriculteurs ici sont habad, souligne Rosenthal. On travaille et on lit la Torah, on n'est pas des ultraorthodoxes comme les autres !» Les mois précédents la Pâque juive, c'est l'usine à matza (le pain spécial des fêtes de Pessah) qui tourne à plein régime. C'est la plus grande du pays, insiste fièrement notre guide, qui tient à montrer les pavillons proprets de la commune — bien plus confortables que les HLM vétustes où s'entassent les familles religieuses vivant des aides sociales à Jérusalem ou Bnei Brak —, ainsi que l'imposante demeure du «marieur». Ici, chaque union passe par lui, no