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Libération
Interview

COP25 «Les arbres ne se déplacent pas assez vite pour s’adapter»

A l'occasion de la COP25 sur le climat, «Libération» publie une série d'interviews sur les liens entre préservation de la biodiversité et lutte contre le dérèglement climatique.
Vol d'oiseaux migrateurs en Allemagne. (Photo Getty Images)
publié le 8 décembre 2019 à 20h46

A l'occasion de la COP 25 sur le climat, «Libération» publie une série d'interviews sur les liens entre préservation de la biodiversité et lutte contre le dérèglement climatique.

Pour la première fois, les organismes scientifiques internationaux spécialisés sur le climat (Giec) et l’étude de la biodiversité (IPBES) publieront un rapport commun l’an prochain. Coauteur de la première évaluation mondiale de l’état de la biodiversité, publiée en mai par l’IPBES et qui soulignait que plus de 40 % des espèces d’amphibiens, plus d’un tiers des récifs coralliens et des mammifères marins sont menacés, Paul Leadley, chercheur à l’université Paris-Sud, explique les interactions entre les espèces vivantes et le dérèglement climatique.

Quelles sont les principales conséquences du changement du climat sur la biodiversité ?

Le principal effet observé est le déplacement de nombreuses espèces vers les pôles et plus haut en altitude, pour rechercher des températures plus supportables. Un exemple frappant est la chenille processionnaire, en France. La limite nord de son aire était, jusque dans les années 70, au niveau d’Orléans. Maintenant on la retrouve dans la région parisienne. La production des bourgeons et la migration des oiseaux sont déjà bouleversées. Si certaines espèces ne peuvent ni bouger ni s’adapter, elles disparaîtront à l’échelle locale. Les récifs coralliens, par exemple, ne peuvent pas se déplacer et subissent déjà une forte mortalité à cause des canicules marines. A + 2 °C par rapport à l’époque préindustrielle, 5 % des espèces risquent l’extinction. A un peu plus de 4 °C, ce taux monte à 15 %, avec un niveau d’incertitude très élevé.

Les arbres sont-ils aussi touchés ?

On observe déjà partout le dépérissement de certaines espèces à cause du réchauffement. En France, le pin sylvestre est une des espèces les plus touchées. Il dépérit dans la partie sud de son aire de vie, mais ne se porte pas bien non plus en forêt de Fontainebleau. Les arbres ne se déplacent pas assez vite pour s’adapter à la hausse des températures mondiales.

Existent-ils des solutions qui permettent à la fois de préserver la biodiversité et de limiter l’emballement climatique ?

Bien sûr. Par exemple, arrêter de détruire les forêts en Indonésie pour l’huile de palme, ou au Brésil pour l’élevage. Il faut aussi restaurer ce qu’on a détruit. Mais cela doit être fait dans le respect de la biodiversité, et pas en replantant des monocultures d’arbres ou des espèces qui ne sont pas locales. D’autres solutions résident dans les systèmes agricoles. Il est ainsi bénéfique d’augmenter dans une certaine mesure les apports organiques des sols avec du lisier : cela leur permet de garder plus de carbone et nourrit la biodiversité.