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Libération

Les règles, un tabou qui tue au Népal

publié le 27 décembre 2019 à 19h46

C'est une victoire pour les militants des droits des femmes au Népal : vendredi, un homme a été arrêté pour avoir causé la mort de sa belle-sœur, Parbati Buda Rawat. La jeune femme avait été exclue de la maison familiale par son beau-frère, car elle avait ses règles. La Népalaise de 21 ans avait été contrainte de passer la nuit dans une cabane. Pour se tenir chaud durant le rude hiver himalayen, elle a allumé un feu. L'inhalation de la fumée l'a tuée. Conformément à la loi népalaise de 2018, qui condamne la pratique du chaupadi, qui signifie «quelqu'un qui porte une impureté» et vise à exclure de leurs maisons les femmes en période de menstruation, le beau-frère de Parbati Buda Rawat risque trois mois de prison et 3 000 roupies (23 euros) d'amende.

Cette tradition vieille de plusieurs centaines d’années se pratique principalement dans les villages de montagne dans l’ouest du Népal. Les femmes sont considérées comme porteuses de malchance pendant leurs règles, et ne sont pas autorisées à dormir dans leur maison. Elles vivent donc dans une cabane faite de boue et de bois et n’ont pas le droit de toucher les symboles religieux, le lait ou le bétail. Ces conditions très précaires mènent régulièrement à des morts, liées à des morsures de serpent, au froid, ou à des infections.

Le porte-parole du ministère népalais de l'Intérieur a déclaré que la mort de la jeune femme avait secoué le gouvernement, qui a lancé une campagne pour abolir le chaupadi. Les avocats et policiers de la région ont été chargés d'informer à nouveau les communautés qui le pratiquent de son interdiction et des risques encourus si la loi n'était pas respectée.

Car, même si la tradition est interdite depuis 2005 et considérée comme une «honte nationale», beaucoup de ceux qui la pratiquent n'ont pas l'air pressés de la voir disparaître.

La nouvelle de la mort de Parbati Buda Rawat est arrivée aux oreilles des militants et des médias, qui ont supplié la police d'intervenir. Celle-ci n'a pas voulu obtempérer. Selon les agents locaux, personne ne s'était plaint des conditions du décès de la jeune femme dans le village, il n'y avait donc pas de quoi enquêter. Ce sont les autorités nationales qui ont repris l'affaire et procédé à l'arrestation du beau-frère. «La police ne fait qu'ajouter de la douleur à notre tristesse, a déclaré au New York Times Krishna Budha, le chef du village. Elle est entrée dans la cabane d'elle-même, elle respectait nos coutumes.» Une étude, publiée dans le journal Sexual and Reproductive Health Matters en décembre, montre que malgré l'interdiction, 77 % des filles âgées de 14 à 19 ans pratiquent le chaupadi.