Début décembre, Sanna Marin s'était déjà distinguée en devenant la plus jeune cheffe de gouvernement de l'histoire de la Finlande, à seulement 34 ans. Rebelote, un mois plus tard : la dirigeante réapparaît dans de nombreux médias, comme le Guardian ou CNews en France, grâce à une «mesure forte», «la semaine de travail de quatre jours, ainsi qu'une limitation des journées à six heures». Soit vingt-quatre heures par semaine. De quoi ringardiser les 35 heures en France…
L'enthousiasme médiatique pour ce nouveau rythme de travail finlandais s'appuie sur une citation de la Première ministre, souvent créditée comme ayant eu lieu lors du 120e anniversaire du Parti social-démocrate de Finlande : «Je pense que les gens méritent de passer plus de temps avec leur famille, avec leurs proches, en se consacrant à des passe-temps et à d'autres aspects de la vie, comme la culture. Ce pourrait être la prochaine étape pour la Finlande.» Seul hic : quand CheckNews a toqué à la porte du gouvernement finlandais pour vérifier l'information, on nous a répondu que c'était «väärä» (faux en finnois). Une source gouvernementale confirme bien la citation de Sanna Marin, mais rappelle qu'elle date d'août 2019, quand Sanna Marin n'était que ministre des Transports. Pour faire taire la rumeur, son entourage insiste sur le fait que cette proposition n'a jamais figuré dans le programme du gouvernement, et n'est donc pas à l'ordre du jour.
Mais comment expliquer, alors, le soudain intérêt de la presse pour cette proposition ? Le site anglophone News Now Finland, spécialisé dans l'actualité du pays nordique, a identifié l'origine de cet emballement médiatique. Le 2 janvier, le média bruxellois New Europe publie un article titré «La Première ministre finlandaise Marin demande une semaine de quatre jours et une journée de travail de six heures dans le pays», dans lequel il note que la déclaration a eu lieu lors du 120e anniversaire du Parti social-démocrate, mais sans préciser que ce dernier a eu lieu en août 2019. Selon News Now Finland, «c'est cet article qui semble avoir suscité d'autres articles, notamment dans la presse britannique, qui […] n'offrent aucun contexte ou chronologie de l'information originale». L'information a ensuite été reprise dans toute l'Europe, sans aucune précaution.