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Libération
Chronique «à l'heure arabe»

Au Liban, un fait divers people exacerbe les tensions avec les réfugiés syriens

A l'heure arabedossier
Toutes les semaines, chronique de la vie quotidienne, sociale et culturelle dans les pays arabes. Ce samedi, un fait divers au Liban.
Nancy Ajram et son mari. (Source Facebook Nancy Ajram)
publié le 18 janvier 2020 à 14h01

Pendant que le Liban est au bord de la faillite et que le reste du Moyen-Orient s’enflamme, un fait divers people focalise l’intérêt du public arabe depuis une dizaine de jours. La photo d’un couple glamour, deux sourires radieux Colgate et quatre yeux bleus, s’affiche en tête des sites d’information et des réseaux sociaux. La belle est une star libanaise de la chanson, Nancy Ajram, 36 ans, célèbre et célébrée du Machrek au Maghreb. A son côté, son mari, Fady Hachem, dentiste et désormais… accusé d’assassinat. Il aurait abattu un homme qui se serait introduit dans la villa cossue de la chanteuse, sur le mont Liban. Pour certains, un crime raciste lié à la nationalité syrienne de la victime.

«Protéger sa famille»

Même si les circonstances du drame font débat, résumons les faits. A l'aube du dimanche 5 janvier, le couple aurait été réveillé par un bruit dans la maison. Le mari de la chanteuse se serait retrouvé nez à nez avec un jeune homme tenant un sac appartenant à Nancy. «J'ai alors saisi une chaise pour le frapper, mais il a brandi un pistolet et m'a demandé de l'argent, assurant qu'il ne voulait pas me faire de mal», raconte Fady Hachem à une chaîne de télévision libanaise. L'époux de la star serait allé chercher de l'argent, mais c'est alors qu'auraient surgi les gardes chargés de surveiller la résidence. Le cambrioleur se serait dirigé vers la chambre des trois petites filles du couple. Fady Hachem se serait saisi d'une arme et aurait tiré seize coups de feu, tuant le malfaiteur dont le pistolet serait finalement un faux.

Arrêté aussitôt et longuement interrogé, le mari de la chanteuse, plaidant la légitime défense, a été relâché au bout de quarante-huit heures, sous caution. Les commentaires et les polémiques ont commencé à faire rage sur les réseaux sociaux. Mettant en cause le récit des événements fait par le mari et pointant l'influence de Nancy Ajram sur la justice pour le faire libérer aussi vite, toutes sortes de rumeurs ont circulé. La diva a dû faire une mise au point à la presse pour le défendre : «Il n'a pas compté le nombre de balles qu'il a tirées, il protégeait sa famille», écrit-elle en réponse aux critiques. Et assure ne pas connaître le supposé cambrioleur, dont elle n'aurait découvert le nom qu'au moment de l'enquête. Elle a démenti que Mohammad Moussa, 30 ans, «travaillait pour eux», comme cela circulait sur les réseaux sociaux.

Sujet explosif

Mais c'est surtout la nationalité de l'homme abattu qui a suscité les réactions les plus véhémentes au Liban, où la présence de plus d'un million de réfugiés syriens est un sujet explosif. D'autant que la famille de l'homme tué a décidé de porter plainte auprès du parquet général et de se constituer partie civile. La mère de Mohammad Moussa a nié en bloc les accusations contre son fils rejetant les condoléances que lui a adressées Nancy Ajram. «C'est un crime raciste», dénoncent plusieurs sites d'information syriens.

«J'espère que tous les criminels de ce genre vont enfin partir du Liban», a écrit sur Twitter Haifa Wehbe, autre star libanaise de la chanson arabe moderne, en exprimant sa solidarité avec Nancy Ajram. Provoquant une nouvelle vague d'échanges d'amabilités sur les réseaux sociaux.