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«chronique l'âge bête»

Incendies en Australie : du tricot pour sauver les animaux

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Partout dans le monde, des tricoteurs confectionnent des poches pour les bébés marsupiaux, devenus orphelins à cause des incendies qui ravagent l'Australie.
Un bébé kangourou secouru par des volontaires, dans la banlieue de Sydney jeudi. (SAEED KHAN/Photo Saeed Khan. AFP)
par Sarah Chopin
publié le 19 janvier 2020 à 17h05

 Tous les dimanches, retrouvez la chronique «l’âge bête», le rendez-vous animal de Libération.

A mesure que le feu avance en Australie, ce sont des millions d'hectares de forêts qui se consument, laissant de très nombreux animaux sans habitat. Quand ils en ressortent vivants. Car les feux qui ravagent le pays depuis plusieurs mois ont déjà tué plus d'un milliard d'animaux (mammifères, oiseaux, reptiles, batraciens et chauve-souris). Les survivants sont le plus souvent des bébés, particulièrement vulnérables.

Face à cette tragédie, un groupe de soignants australiens, Animal Rescue Collective Craft Guild, a lancé un appel, incitant les volontaires à prendre fil et aiguilles pour tricoter des poches en laine qui serviront aux bébés marsupiaux devenus orphelins.

On dénombre plus de 330 espèces de marsupiaux dans le monde, parmi lesquels les plus connus sont les kangourous ou les opossums. Les deux tiers de ces animaux vivent en Australie. Pendant les premiers mois de leur vie, ces bébés sont nourris dans la poche ventrale de leur mère grâce aux mamelles qu'elles contiennent. A la naissance, les membres inférieurs des marsupiaux ne sont pas formés. D'où la nécessité d'être portés pendant les six premiers mois.

Créé en avril, le groupe Facebook de l'Animal Rescue Collective Craft Guild a connu ces dernières semaines un engouement extraordinaire. D'environ 23 000 membres au début du mois, il est passé à plus de 220 000. Des Britanniques, des Allemands ou encore des Américains postent chaque jour des photos de leurs créations, prêtes à être envoyées en Australie.

CREDIT : Facebook Animal Rescue Craft Guild

Photo publiée sur le groupe Facebook de l'Animal Rescue Collective Craft Guild.

«Des espèces qui n’existent pas ailleurs»

«C'est une bonne chose que les gens se préoccupent autant de ces animaux», se réjouit Christine Hosking, chercheuse à l'université de Queensland, à Brisbane (dans l'est du pays) dont les travaux se concentrent sur les effets du changement climatique sur l'habitat des animaux. «Les bébés marsupiaux recueillis par les soignants ont besoin de soins intensifs, ajoute-t-elle. Il leur faut un environnement chaud et rassurant. C'est à ça aussi que servent les poches.»

Mais le sort de ces animaux n'a pas toujours joui de la même attention, alors même qu'une trentaine d'espèces se sont déjà éteintes ces dernières années à cause du réchauffement climatique. «C'est terrible car ce sont des espèces qui n'existent pas ailleurs», déplore Christine Hosking. Ces incendies auraient-ils réveillé les consciences ? «Je l'espère, souffle la chercheuse. Il faut que les Australiens comprennent qu'ils ont besoin de la biodiversité.»

Une fois les feux éteints, les soignants auront bien d'autres problèmes à régler, en particulier quand les bébés auront grandi et qu'il faudra les relâcher dans la nature. Mais où, alors que des millions d'hectares de forêts ont déjà été dévastés et que la saison des feux ne fait que débuter ? «Malheureusement, il va falloir qu'ils s'habituent à un nouvel habitat qui n'est pas le leur, conclut Christine Hosking. Il y aura forcément moins de territoire et donc une lutte plus acharnée pour la nourriture.»