Menu
Libération

A Buckingham, un nuage de lait dans le gaz

publié le 22 janvier 2020 à 21h01

L'île anglo-normande de Jersey, territoire de la couronne britannique situé au large de Saint-Malo, est surtout connue pour ses avantages fiscaux. On parle moins de ses vaches et du lait qu'elles produisent. Un lait tellement délicat qu'il convient aux palais royaux comme celui de Peter Phillips, petit-fils de la reine Elizabeth II. Le fils de la princesse Anne, seule fille de la souveraine, en a vanté les mérites dans une publicité chinoise. La révélation par le Daily Mail qu'un petit-fils de la reine utilise ses liens royaux pour générer des revenus à travers une publicité a ébranlé encore un peu la famille royale. Après le prince Andrew et ses liens avec Jeffrey Epstein, après l'exil volontaire au Canada de Meghan et Harry, ces dernières révélations commencent à faire beaucoup. D'autant qu'une autre proche de la famille, Lady Kitty Spencer, nièce de la princesse Diana et cousine germaine des princes Harry et William, s'est elle aussi laissé tenter par une publicité laitière à destination de la Chine.

La réputation de la couronne est en jeu, et surtout sa force de soft power, ce pouvoir de séduction ou de conviction qui permet, parfois, de signer des contrats juteux ou de résoudre des crises diplomatiques. Le gouvernement en use largement, envoyant régulièrement aux quatre coins du monde tel ou tel membre de la famille royale. Il compte bien l'utiliser encore plus, une fois le Brexit entériné.

D’où l’importance de maintenir un certain standing et de ne pas passer pour un vulgaire marchand de soupe. Le problème est qu’il existe deux types de membres de la famille royale. Ceux nés dans la famille, comme Peter Phillips, qui ne disposent d’aucun titre ni fonds versés par les contribuables. Et ceux qui sont en fait des employés de la «firme», le surnom de la famille royale. A ce titre, ils sont soumis à des devoirs et des obligations précises, notamment en matière de décence. Ces règles ont même un nom depuis 1995 : on les surnomme les «principes de Nolan», du nom d’un lord chargé en 1994 de se pencher sur l’éthique des standards de comportement dans la vie publique, après une série de scandales. On en compte sept : altruisme, intégrité, objectivité, responsabilité, transparence, honnêteté et leadership. Tout membre de l’administration ou élu de la vie publique est supposé les respecter. La famille royale a également endossé ces principes. Mais, à ce jour, seule la reine n’a jamais dévié de la ligne.