Les pelures de manioc s'amoncellent aux pieds d'Augustin Munyakumburwa en cet après-midi de janvier. L'homme, 61 ans, corps frêle, épluche méticuleusement les derniers morceaux pour le repas du soir. En face de lui, dans leur petite courée familiale, sa femme, Gertrude Nikuze, trie un tas de haricots rouges. Une scène de la vie quotidienne en apparence banale mais qui est en réalité une petite révolution dans ce village, Muhororo II, à une soixantaine de kilomètres de Kigali, la capitale rwandaise. «Quand j'ai commencé à aider ma femme à la maison, en faisant la cuisine ou en portant mes petits enfants dans le dos, nos voisins ont pensé qu'elle m'avait ensorcelé», se souvient Augustin, qui se dirige vers une petite pièce aux murs de terre rouge enfumée par les braises. Dans leur cuisine, où il n'avait jamais l'habitude de mettre un pied, Augustin agite fièrement un morceau de carton pour attiser le feu sous la casserole d'eau bouillante.
Exercices pratiques
Ce changement, le couple proche de la retraite le doit à une ONG locale, Rwanda Men's Resource Centre (Rwamrec), fondée par neuf hommes en 2006, qui enseigne l'égalité dans les villages : 17 séances de formation pour décortiquer la notion de genre ou encore l'évolution du droit des femmes dans ce petit pays grand comme la Bretagne mais qui compte 12 millions d'habitants. Des exercices pratiques pendant lesquels Augustin a appris à s'occuper de son foyer, à s'y investir, par des activités simples, comme les tâches ménagères. «Au R