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Libération
Récit

Liban : un vote de confiance assuré pour un gouvernement déjà rejeté

Les manifestants appellent à une mobilisation monstre ce mardi, alors que le Parlement doit valider la constitution du nouvel exécutif, soutenu par le Hezbollah.
Dans un quartier majoritairement chiite de la capitale libanaise, le 17 janvier. (Photo Myriam Boulos)
publié le 10 février 2020 à 20h06

«Pas de confiance !» Le slogan fleurit sur les réseaux sociaux libanais ces derniers jours pour appeler à une mobilisation massive des manifestants ce mardi, alors que le Parlement se réunit pour voter la confiance au nouveau gouvernement. Celui-ci présente son programme censé répondre à l'urgence politique et économique dans le pays au bord de la banqueroute et confronté à une contestation massive de son système politique.

«Mur de Berri-lin»

Avec une économie en récession (officieusement -7 %), un déficit public de 166 % du PIB du fait d'une dette avoisinant les 82 milliards d'euros, une moitié de la population active menacée de se retrouver sous le seuil de pauvreté selon la Banque mondiale, une livre libanaise en chute vertigineuse face au dollar sur le marché noir, le défi est colossal pour le gouvernement de Hassan Diab, formé le 21 janvier. En revanche, obtenir le vote des députés ne sera qu'une formalité, puisque le gouvernement est issu des partis majoritaires au Parlement. Un «gouvernement monocolore», comme le surnomment ses opposants, un cabinet de technocrates avec de nouveaux visages, qui ont néanmoins tous obtenu l'imprimatur du Hezbollah.

La domination du parti-milice allié à la formation du président Michel Aoun est dénoncée par la rue, qui rejette également les autres dirigeants traditionnels, «qui ont mené le pays à sa ruine». La formule a été reprise lundi par un communiqué du regroupement de la Diaspora libanaise unie. Réaffirmant «son rejet de la classe politique dans son ensemble», celui-ci réclame «un gouvernement de technocrates indépendants, non confessionnels et non communautaires». Détournant le slogan du mouvement appelant au départ de «tous, c'est-à-dire tous» les dirigeants, la contestation appelle «tous, c'est-à-dire tous» les Libanais à descendre dans les rues ce mardi pour dénier la confiance au gouvernement. Les manifestants ne pourront toutefois s'approcher du bâtiment du Parlement, cerné par des pans de mur en béton. Ce nouveau «mur de Berri-lin», comme l'ont baptisé les contestataires en référence à Nabih Berri, l'indéboulonnable président du Parlement depuis trente ans, pourra seulement protéger physiquement les ministres et parlementaires. Mais il faudra plus pour calmer le soulèvement contre une classe dirigeante accusée de corruption et d'incompétence.

«Plan d’action»

Le Liban s'était engagé en 2018 à réduire son déficit public et à entreprendre des réformes structurelles en contrepartie d'aides de la communauté internationale à hauteur de 10,6 milliards d'euros. Ces sommes n'ont toujours pas été déboursées, faute de réelles avancées des autorités. «J'espère que le gouvernement aura un plan d'action clairement défini […] avec des dates butoirs», a indiqué mercredi le coordinateur spécial de l'ONU pour le Liban, Jan Kubis. «Après ça, nous allons essayer d'aider», a-t-il précisé, ajoutant que «les conditions, c'est réformes, réformes, réformes».