A l'heure où, partout en Europe, on débat de la date de fermeture des dernières mines de charbon, le gouvernement polonais envisage d'en ouvrir une nouvelle. Une mine de lignite à ciel ouvert, particulièrement profonde, qui obligerait 3 000 personnes vivant aux alentours de Zloczew, dans le centre de la Pologne, à quitter leurs foyers.
Son ouverture permettrait d'alimenter la centrale électrique de Belchatow, située à une soixantaine de kilomètres. Cette centrale cumule les superlatifs : installation industrielle la plus émettrice de CO2 de toute l'Union européenne, elle est aussi la principale source d'électricité du pays, puisqu'elle en produit à elle seule 20%. Elle est pour l'instant alimentée par deux mines toutes proches, dont les gisements devraient arriver à épuisement aux alentours de 2030. La nouvelle mine de Zloczew serait alors là pour prendre le relais, et alimenter la centrale pour encore trente ans.
Estimé à environ 3,5 milliards d'euros, ce projet est dans les cartons depuis 2015. Le gouvernement mené par le parti conservateur Droit et justice (PiS) vient de lui donner un nouvel élan en donnant son accord au projet, remplissant ainsi l'une de ses promesses électorales. Cette annonce intervient peu de temps après une autre décision prise au début du mois de février et qui met un terme à l'achat de charbon russe par les entreprises d'Etat polonaises. Moins cher et de meilleure qualité que le charbon polonais, il représentait ces dernières années une part grandissante du charbon utilisé dans les centrales polonaises. Le record a été atteint en 2018, avec 19,3 millions de tonnes importées, alors que la production polonaise avoisinait les 50 millions de tonnes.
Rationalité économique
Le secteur charbonnier, toujours central dans l'économie polonaise, connaît de plus en plus de difficultés. L'an dernier, la production a chuté pour atteindre son point le plus bas depuis cinq ans, et la part du charbon dans la production d'électricité a reculé pour passer de 80 à 74%, sa plus faible proportion jamais enregistrée. D'après la Banque mondiale, la part du charbon dans le PIB a chuté depuis 2008, pour atteindre seulement 0,27% en 2017.
Le gouvernement, qui a été le seul de l'UE à ne pas s'engager à atteindre la neutralité carbone d'ici 2050, soutient activement le secteur. D'après le plan qu'il a soumis à la Commission européenne en décembre, le charbon devrait encore représenter 56% de son mix électrique en 2030. Une aberration pour Greenpeace Pologne, qui milite pour la fin du recours à ce combustible d'ici dix ans.
Mais malgré tout le volontarisme du PiS, la rationalité économique et environnementale finira par mettre un terme au règne du charbon. Jeudi, Energa et Enea, deux fournisseurs d'électricité, ont annoncé qu'ils renonçaient à construire une nouvelle centrale à charbon à Ostroleka, dans le nord-est polonais, face à leurs difficultés à lever les fonds nécessaires.