Albert Einstein aurait un jour définit la folie comme «faire toujours la même chose et s'attendre à un résultat différent». Même apocryphe, la maxime s'applique à l'Israël de 2020, où l'on doit voter pour la troisième fois en un an pour quasiment les mêmes listes et têtes d'affiche. «Bibis repetita» : faut-il reconduire le septuagénaire Benyamin Nétanyahou, recordman de longévité et justiciable inquiété, alors que son procès pour fraude, corruption et abus de confiance doit s'ouvrir le 17 mars, deux semaines après le scrutin, comme on l'a appris mardi ? L'alternative étant l'ex-général Benny Gantz, qui a considérablement droitisé sa posture et ne se distingue plus de Nétanyahou que sur le style, moins populiste.
Le Premier ministre sortant s'est fixé un objectif : ramener les 300 000 brebis égarées qui manquent à son bloc nationaliste religieux. Alors, aucune communauté n'est oubliée. Y compris les francophones israéliens, qui ont eu droit à un meeting dédié dimanche à Jérusalem. A huis clos, la presse française étant condamnée à regarder le show Nétanyahou sur son «live» Facebook. Sous les vivas et les «je t'aime», le Premier ministre lance dans la langue de Molière : «Mes chers frères, mes chères sœurs, vous êtes attachés à la terre d'Israël, au peuple d'Israël, à la Torah d'Israël !» En hébreu, il déroule ses classiques, du «terrorisme islamiste» à l'antisémitisme en France. Jusqu'à son tube du moment : le «deal du siècle», préparé main dans la main avec le président Trump, qui prévoit l'annexion des colonies de Cisjordanie occupée et de la vallée du Jourdain. «Je crois que c'est un plan qui est pas mal… Qu'en pensez-vous ?» Petite standing-ovation. Un Etat palestinien, même croupion, c'est encore trop pour certains.
Le lendemain, à Tel-Aviv, c'est au tour de Benny Gantz d'essayer de séduire les «olims» (nouveaux immigrants) dans un questions-réponses façon «keynote», en anglais. Des casques pour la traduction en français sont distribués. Gantz est flanqué de son numéro 2, l'ex-présentateur télé Yaïr Lapid, très à l'aise. Le duo promet du «changement», surtout sur le front social. Le plan Trump ? Gantz : «J'ai bien quelques remarques, mais en tant que package, […] c'est une base solide…» Les questions s'enchaînent. Les réponses, évasives, aussi. Difficile de faire de nouveaux convertis, «la capacité du peuple israélien à écouter après trois élections [étant] quelque peu limitée…» reconnaît Lapid.