Hanau, capitale de la douleur. On y pleure les neuf victimes de l’attentat raciste de mercredi soir. Jeudi, les politiques se sont succédé pour leur rendre hommage. Un peu partout en Allemagne, on porte le deuil. Célébrations annulées, drapeaux en berne devant le Reichstag ou les Parlements régionaux, la tristesse se répand.
Dans la presse, on rend hommage aux victimes. Mohammed Beyazkendir, 20 ans, a survécu. De l'hôpital, le jeune homme raconte au tabloïd Bild les coups de feu, qu'il prend d'abord pour des pétards ; le visage du tueur ; les corps qui s'amoncellent à mesure que les victimes s'effondrent. «Nous étions une montagne d'hommes», dit-il. On nous parle aussi de Ferhat U., 22 ans. Il avait «la vie devant lui», écrit le journal. Il venait de terminer son apprentissage, il aimait la techno et le hip-hop et il aimait aussi, parfois, passer la soirée à l'Arena Bar avec ses amis. Il y est mort, abattu par le terroriste raciste Tobias R.
Avec le deuil, vient aussi le temps des questions. Le fait que «l'Allemagne ait un véritable problème nazi» a été ignoré pendant bien trop longtemps dénonce l'hebdomadaire Der Spiegel. «Pendant des années, le problème de l'extrémisme de droite a été minimisé et réduit à des cas individuels. Les autorités n'ont pas su s'adapter à l'évolution de la situation, l'organisation en réseaux internationaux et numériques, analyse Robert Lüdecke, de la Fondation Amadeu-Antonio contre le racisme et l'antisémitisme. La haine de l'extrême droite normalise les attitudes violentes et inhumaines, l'AfD les porte dans les Parlements et leur donne une légitimité dans le cadre du discours démocratique. C'est dans ce climat social que les terroristes d'extrême droite se sentent encouragés à frapper».
Le parti d'extrême droite est accusé, comme ce fut le cas au moment de l'attentat de Halle, de créer un climat violent, le député Vert Cem Özdemir le décrivant comme «le bras politique de la haine». Et ce, alors que des membres de la CDU, le parti d'Angela Merkel, s'interrogent sur une éventuelle coopération avec l'AfD, comme le montre la crise gouvernementale en Thuringe.
«Hanau confirme ma position selon laquelle […] il ne doit pas y avoir de coopération avec un parti qui tolère les extrémistes de droite et, oui je le dis aussi délibérément, les nazis dans ses propres rangs», a tranché jeudi la cheffe démissionnaire de la CDU, Annegret Kramp-Karrenbauer. Sauf que dans son parti, tout le monde ne pense pas comme elle.