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Libération
Covid-19

Le virus s’étend en Iran, les voisins se barricadent

La République islamique a annoncé la mort de 12 personnes, alors que les autorités sont accusées de cacher la réalité des chiffres.
Coronavirus dans le monde le 24 février. (Christelle Perrin)
publié le 24 février 2020 à 20h31

Téhéran, mégalopole d’une dizaine de millions d’habitants, connaît souvent d’affreux pics de pollution qui obligent notamment les écoles à fermer. Depuis samedi matin, premier jour ouvré de la semaine en Iran, ce n’est pas pour se protéger de l’air vicié de la capitale que les habitants portaient des masques dans les rues, mais contre le coronavirus. Des affichettes contre les serrages de main commençaient même à apparaître à l’entrée d’entreprises. Après la Chine, l’Iran est devenu le foyer comptant le plus de morts du «Covid-19», et en seulement quelques jours à en croire les déclarations officielles.

 Tentaculaire

Les premiers cas ont été annoncés au milieu de la semaine dernière dans la ville sainte de Qom, siège de nombreuses écoles et institutions religieuses. Selon le ministre de la Santé, l'un des deux serait un commerçant ayant fait récemment des allers-retours en Chine. Depuis, 12 personnes sont mortes en Iran sur un total de 61 personnes contaminées, y compris dans la capitale. Le président du conseil municipal, Mohsen Hachémi, s'est dit prêt à mettre la ville en quarantaine «si le nombre de personnes infectées augmente». Une perspective qui paraît difficile à imaginer, tant la métropole est tentaculaire et dépend des échanges journaliers avec sa banlieue.

Les autorités ont annoncé des «mesures préventives» dans 14 des 31 provinces du pays. De nombreux lieux publics (écoles, universités, cinémas, théâtres) sont temporairement fermés. Dans la région, les Etats se barricadent. L'Arménie, l'Afghanistan, le Pakistan, la Jordanie, la Turquie et le Tadjikistan ont restreint les échanges avec l'Iran de manière temporaire, de même que l'Irak, où un Iranien a été diagnostiqué lundi, et Oman, où deux citoyennes de retour d'Iran ont été détectées porteuses du virus. Le Koweït est en train de rapatrier ses ressortissants, dont au moins trois sont contaminés, et a fermé ses ports et aéroports aux passagers et navires en provenance d'Iran.

 «Transparent»

L'Organisation mondiale de la santé a jugé lundi la situation «très préoccupante» dans les nouveaux foyers infectieux, dont l'Iran. Elle l'est d'autant plus dans la République islamique que les autorités sont soupçonnées de dissimuler la réalité. Un député de la région de Qom, Ahmad Amirabadi Farahani, a accusé dimanche soir le gouvernement de «mentir au peuple», affirmant qu'«environ 50 personnes» étaient mortes à cause du virus. «Je nie catégoriquement cette information», a répliqué le vice-ministre de la Santé, Iraj Harirchi. Le porte-parole du gouvernement a quant à lui promis d'«être transparent sur la publication des chiffres».

Cet engagement ne suffira certainement pas à rassurer, tant le pouvoir s’est discrédité en janvier. Après le crash d’un Boeing d’Ukraine International Airlines, qui a tué les 176 personnes à bord, les autorités ont martelé la thèse de l’accident. Avant de se rétracter quelques jours plus tard, contraintes et forcées par les accusations internationales. Ce 8 janvier, l’Iran venait de tirer une salve de missiles contre les installations militaires américaines en Irak, en riposte à l’assassinat, quelques jours plus tôt, du général des Gardiens de la révolution, Qassem Soleimani. Les forces armées ont accidentellement abattu l’avion civil au petit matin, ainsi qu’elles l’ont reconnu après trois jours de mensonge.