«La compétition démocrate se recentre sur Biden et Sanders» : en ouverture de son site, le New York Times résume l'enseignement majeur du Super Tuesday. Les quatorze primaires organisées dans la nuit ont vu neuf victoires de Joe Biden (et probablement le Maine en dixième) et quatre de Bernie Sanders, transformant le marathon en duel, avec un avantage à l'ancien vice-président de Barack Obama. «C'est une démonstration de force remarquable de Joe Biden, poursuit le journal new-yorkais. En trois jours à peine, il a ressuscité une campagne qui menaçait de s'effondrer après ses défaites dans les trois premiers scrutins.»
«La percée de Biden change la course», abonde Politico, pour qui «le Super Tuesday a démontré que, lorsque l'enjeu est maximal, la politique n'est pas une question de mode, mais de force. […] Les victoires de Joe Biden ont été permises par l'électorat historique des démocrates, les Afro-Américains et les travailleurs, et par les banlieues, où l'opposition à Donald Trump est de plus en plus forte». Le momentum du Super Tuesday est revenu à Joe Biden, qui, remarquent tous les médias américains, a même remporté des Etats où il n'avait pas mené campagne personnellement et où il affrontait des sénateurs locaux, le Minnesota et le Massachusetts. «Biden avait du retard en termes d'organisation et de financement sur Sanders dans les Etats qui votaient au Super Tuesday», rappelle le Washington Post, pour qui «le rassemblement express autour de la candidature de Biden lui a donné ce que l'argent et le travail de terrain de Sanders ne pouvaient pas apporter.»
Eviter toute conclusion trop hâtive
Pour Joe Biden, ce résultat est inespéré. «De l'ordre de l'impensable il y a encore une semaine», pour le New York Times, qui rappelle qu'alors certains de ses soutiens «évoquaient discrètement comment il pourrait mettre dignement un terme à sa campagne : faire un score honorable en Caroline du Sud, puis se retirer en homme d'Etat». Pour Sanders, en revanche, c'est une contrariété. D'autant que les prochains scrutins ne seront pas forcément évidents pour lui : «dans les prochaines semaines vont voter beaucoup d'Etats où il avait perdu face à Hillary Clinton voilà quatre ans», souligne le Washington Post.
Mais les médias américains sont aussi unanimes pour éviter toute conclusion trop hâtive, dans cette course à l'investiture qui multiplie les rebondissements. «Cette primaire a montré plus d'une fois comme il peut être périlleux d'être en tête, d'abord pour Biden (au tout début), puis Warren (qui s'est écroulée après un bel été), puis Buttigieg (qui a remporté l'Iowa et presque le New Hampshire, pour seulement démontrer que ces Etats ne comptent plus tant que ça), puis Sanders (dont l'investiture était considérée par bon nombre de commentateurs comme très possible il y a encore quelques jours)», énumère Politico. «Il est possible que cette course reste indécise jusqu'à la Convention démocrate, à Milwaukee, en juillet».
«L’aboutissement logique du débat idéologique qui traverse le Parti démocrate»
D'autant plus qu'à l'heure actuelle, Mike Bloomberg et Elizabeth Warren sont toujours en course et «piquent» des délégués à Biden et Sanders, même s'ils n'ont plus aucune chance d'obtenir l'investiture démocrate. «Il s'agit désormais d'un duel. La question est de savoir quand Bloomberg et Warren l'accepteront», résume le Washington Post.
Un duel qui n'a pas encore donné son verdict. «Pour arriver avec une majorité nette à Milwaukee, Biden aura besoin d'autres soirées très réussies comme celle-ci dans les prochaines semaines, estime Politico. Et que Sanders ne gagne pas d'autres gros Etats avec une grosse avance, comme la Californie.» Mais pour le New York Times, que la course démocrate se termine par une finale Biden-Sanders a somme toute quelque chose de normal. «C'est en fait l'aboutissement logique du débat idéologique qui traverse le parti, et sur comment il ambitionne de gouverner : Donald Trump est-il le symptôme d'une maladie qui ronge les Etats-Unis depuis longtemps, ou une simple "anomalie", comme l'a suggéré Biden.»