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Libération
Récit

Coronavirus : l’Allemagne fait ses «achats de hamster»

Malgré la ruée vers les supermarchés et les mesures différentes selon les Länder, les autorités se disent préparées, mais s’inquiètent des conséquences économiques.
Lors d'une réunion des ministres de l'Economie des 16 régions allemandes. (Photo Michele Tantussi. Reuters)
publié le 10 mars 2020 à 18h26

«Oui à la vigilance, non à l'alarmisme.» Cette phrase, prononcée lundi soir par la ministre de la Recherche, Anja Karliczek, résume l'attitude des autorités allemandes face au Covid-19. Si l'épidémie est prise très au sérieux et que l'on s'attend à une hausse des cas et à de futures restrictions, les autorités se disent relativement bien préparées.

Match fantôme

Depuis mardi, les seize Länder du pays sont concernés par le virus. On compte deux morts et, mardi à la mi-journée, 1 139 cas de contamination étaient signalés, une grande partie d’entre eux étant concentrés en Rhénanie-du-Nord-Westphalie (484). Deux autres Länder sont particulièrement affectés, la Bavière et le Bade-Wurtemberg. A Berlin, on compte un peu moins de 50 cas.

L'institut Robert-Koch, établissement fédéral de lutte contre les épidémies, appelle désormais les hôpitaux d'Allemagne à activer un plan d'urgence : report des opérations non indispensables, isolement des patients infectés avec un personnel dédié, protection accrue des personnes âgées et des malades chroniques. Depuis une semaine, le pays interdit l'exportation des masques de protection. Dimanche, le ministre de la Santé, Jens Spahn, déconseillait la tenue de rassemblements de plus de 1 000 personnes, sans formellement les interdire. Sur ce point, chaque Land peut légiférer comme il le souhaite. Ainsi le gouvernement de Bavière vient-il d'annoncer leur interdiction, «dans le doute», et ce jusqu'au 19 avril. En football, le match Mönchengladbach-Cologne de ce mercredi soir doit se jouer à huis clos : ce sera le premier «match fantôme» de l'histoire de la Bundesliga.

Un sujet inquiète tout particulièrement outre-Rhin : les conséquences sur l’économie allemande, déjà fragilisée par de multiples facteurs (dieselgate, Brexit, tensions commerciales mondiales), et qui a frôlé la récession à plusieurs reprises ces derniers mois. L’Institut allemand pour la recherche économique estime que cette fois, le pays n’y échappera pas et que l’industrie, la restauration et le tourisme devraient être particulièrement touchés.

Lundi noir

Lundi, un plan de soutien à l’économie était annoncé par la grande coalition, avec notamment le recours facilité au chômage partiel - outil largement utilisé lors de la crise mondiale de 2008 -, l’octroi de prêts en cas de difficultés de trésorerie et une enveloppe de 12,8 milliards d’euros. Ces annonces sont tombées le jour même du lundi noir sur les marchés mondiaux, où le Dax a connu sa plus lourde chute depuis le 11 septembre 2001 (-7,94%).

Si les Allemands se montrent relativement sereins face à l'épidémie, on voit poindre çà et là des signes de fébrilité : la Croix-Rouge se plaint d'une baisse significative de dons du sang, et dans tout le pays les supermarchés sont vidés de leurs stocks de papier toilette et de pâtes. Ce phénomène a un nom, hamsterkäufe, les «achats de hamster». «Voilà bien quelque chose de typiquement allemand, s'amusait ce week-end le chroniqueur d'une émission satirique sur la ZDF. L'apocalypse frappe à la porte et que disent les Allemands ? Vite, il me faut du PQ !»