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Libération
Récit

Coronavirus : la Grande-Bretagne s’en lave les mains

Le gouvernement de Boris Johnson est critiqué pour sa passivité dans un pays, où, en plus, les services de santé publique étaient déjà saturés.
Le Premier ministre, Boris Johnson, au 10 Downing Street à Londres lundi. (ALBERTO PIZZOLI/Photo Alberto Pizzoli. AFP)
publié le 10 mars 2020 à 18h26

On ne change rien et on continue à se laver les mains, pendant 20 secondes minimum, «le temps de chanter deux fois Happy Birthday», comme l'a expliqué le Premier ministre britannique, Boris Johnson. Avec près de 380 cas positifs et 6 décès (de personnes âgées de plus de 70 ans et souffrant de pathologies antérieures), le gouvernement a décidé de s'en tenir pour le moment à la phase 1 de la lutte contre l'épidémie, à savoir tenter de «contenir» le virus. Aucune autre mesure n'a été mise en place, si ce n'est, depuis lundi soir, la recommandation d'éviter tout voyage vers l'Italie, sauf en cas d'urgence majeure. British Airways, Ryanair et EasyJet ont suspendu tous leurs vols vers et en provenance de ce pays. Mais les rassemblements et événements sportifs restent d'actualité. Les courses hippiques du festival de Cheltenham ont commencé mardi, 60 000 visiteurs sont attendus quotidiennement pendant quatre jours.

Pourtant, les autorités britanniques reconnaissent qu'il ne s'agit plus que d'une question de temps, sans doute «une dizaine de jours», avant que la situation ne s'aggrave «de manière significative». Le docteur Jenny Harries, conseillère spéciale adjointe du gouvernement pour les questions de santé, a laissé entendre mardi que, très rapidement, les personnes présentant les symptômes d'un refroidissement pourraient être priées de s'isoler chez elles. Des réunions Cobra, qui rassemblent autour du chef du gouvernement les principaux ministres et acteurs concernés par la lutte contre l'épidémie, sont organisées tous les deux jours. La prochaine a lieu ce mercredi. Les supermarchés ont été autorisés à modifier leurs horaires de livraison, pour leur permettre de reconstituer leurs stocks. Les étalages sont vidés régulièrement par des achats compulsifs et paniqués, notamment de papier toilette, de pâtes et de tomates en conserve.

Le gouvernement et Boris Johnson sont critiqués pour leur apparente réticence à prendre des mesures plus drastiques, alors que l'expansion de l'épidémie semble inévitable. Le Premier ministre explique s'appuyer sur les avis des experts médicaux, en insistant sur le fait que «le risque est que si nous instaurons des mesures trop tôt, les gens s'en lasseront et cesseront de les respecter».

Mercredi, le chancelier de l’Echiquier, Rishi Sunak, doit présenter le premier budget post-Brexit. Il devrait annoncer une série de mesures pour soutenir le service de santé et l’économie. Des banques, comme RBS et TSB, ont déjà annoncé être prêtes à autoriser des retards de paiement des prêts pour les plus touchés par l’épidémie.

La question principale pour le National Health Service (NHS), le service de santé publique, est de savoir s'il aura la capacité de répondre à cette crise, alors qu'il est déjà à la limite de la saturation après notamment des années de coupes budgétaires. Le NHS s'est déjà placé en alerte «quatre», son plus haut niveau. Trente hôpitaux disposent d'unités de maladies infectieuses capables de maintenir en isolation les patients. En termes de lits en soins intensifs, le Royaume-Uni se situe en queue du classement européen, avec 6,6 lits pour 100 000 personnes, très loin derrière l'Italie (12,5), l'Allemagne (29,2) ou la France (11,6) et bien en dessous de la moyenne européenne de (11,5). Selon des données du NHS, ces lits en soins intensifs sont déjà occupés en période normale à «entre 70 et 80 %» de leurs capacités.