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Libération
Covid-19

Les commerces italiens, à l'exception de l'alimentaire et de la santé, sommés de baisser le rideau

Le confinement a été porté à un niveau supplémentaire dans la péninsule pour tenter d'endiguer l'épidémie. Seuls les magasins alimentaires, les pharmacies, les banques, les postes, les bureaux de tabac et les kiosques à journaux restent ouverts.
Allocution télévisée du président du COnseil italien, Giuseppe Conte, mercredi soir. (ELIANO IMPERATO/Photo Eliano Imperato. Controluce/AFP)
par Eric Jozsef, correspondant à Rome
publié le 12 mars 2020 à 7h23

Le coronavirus fait la peau à l'espresso. L'Italie s'est en effet réveillée ce jeudi matin avec un nouveau décret gouvernemental qui ordonne la fermeture de tous les bars du pays. «Chiuso» aussi pour les trattorias, «les pubs, les restaurants, les coiffeurs, les centres esthétiques», a listé le président du Conseil, Giuseppe Conte, qui est venu annoncer ces nouvelles restrictions mercredi soir dans une allocution solennelle. «Nous fermons les commerces», a résumé le chef du gouvernement qui seulement deux jours plus tôt avait déjà placé l'Italie en «zone protégée», imposant des restrictions à la liberté de circulation et une interdiction de rassemblement à tout le pays. «Si on dit aux gens de rester chez eux, à quoi ça sert de maintenir les boutiques ouvertes ?» s'était interrogé dès mardi Luigi Ferrario, responsable d'une association de commerçants de Milan alors que tous les magasins de la péninsule sont déserts depuis la diffusion du Covid-19.

Mais c'est essentiellement pour tenter d'endiguer la propagation que Giuseppe Conte a renforcé l'arsenal des mesures en allant jusqu'à faire baisser les rideau à tous les commerces italiens. Car la tragique propagation du coronavirus se poursuit dans la Botte. Au total plus de 12 000 contaminations (dont, depuis mercredi, le joueur de la Juventus Turin Daniele Rugani) et 827 morts ont été recensées depuis le début de la crise. Dès mercredi, le quotidien La Repubblica posait les termes du problème : «Jusqu'à présent la tendance a été inexorable. Dans les services de soins intensifs du nord de l'Italie, il y avait 35 malades de coronavirus le 25 février, 105 le 29 février, 351 le 5 mars, 650 le 8 mars et 877 le 10 mars. Si cela devait continuer ainsi, d'ici une dizaine de jours le nombre de personnes devant être hospitalisées en réanimation pourrait dépasser le chiffre de 10 000, soit bien au delà des 6 400 lits disponibles.»

Les industries et les usines épargnées

D'où cette décision radicale de fermer tous les commerces (les bars et les restaurants avait déjà depuis lundi pour obligation de cesser l'activité à 18 heures), qui était vivement réclamée par les présidents des régions du Nord – à commencer par la Lombardie, la zone la plus touchée par l'épidémie. Seront toutefois épargnés les secteurs de la distribution alimentaire, les livraisons à domicile, les pharmacies, les banques, les postes, les bureaux de tabac et les kiosques à journaux. Pour l'heure, le service public des transports restera assuré. «Les industries et les usines pourront continuer à assurer leur production», a ajouté Giuseppe Conte, précisant toutefois : «à condition qu'elles prennent les mesures de sécurité idoines pour éviter la contagion». En parallèle, le chef de la protection civile, Angelo Borrelli, a indiqué hier que les sorties à pied, dans les rues, devront désormais être elles aussi justifiées par les intéressés.

Au terme de son allocution, le chef du gouvernement a estimé, en forme de vœu, que «les effets de ce grand effort seront visibles dans une quinzaine de jours». Au passage, Giuseppe Conte a mis en avant que l'Italie était exemplaire dans sa réponse à l'épidémie. Le directeur de l'Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a d'ailleurs salué les mesures «courageuses» et les «véritables sacrifices» consentis par Rome alors que dans le même temps l'OMS déplore, sans désigner nommément des pays, des «niveaux alarmants […] d'inaction». De l'autre côté des Alpes, on s'interroge notamment sur ce qui est considéré comme une inexplicable passivité française. Et l'on n'apprécie guère les commentaires de Sibeth Ndiaye, la porte-parole de l'Elysée selon laquelle «l'Italie a pris des mesures qui n'ont pas permis d'enrayer l'épidémie», sous-entendu à la différence de la France. «Espérons Madame que vous n'ayez pas à regretter ces paroles pleines de dédain pour les mesures prises en Italie», a vertement répliqué sur Twitter l'intellectuel Giuliano da Empoli, ancien conseiller politique de Matteo Renzi.