L’ancien vice-président Joe Biden continue sur sa lancée victorieuse pour la troisième semaine consécutive, au terme d’une nouvelle journée de primaires perturbée par la pandémie de coronavirus. Il remporte largement les trois Etats en jeu ce mardi : la Floride (62 % contre 23 %), plus gros pourvoyeur de délégués de la soirée, l’Illinois (60 % contre 36 %), et l’Arizona (43 % contre 30 %), creusant encore un peu plus l’écart sur son rival, le sénateur indépendant du Vermont Bernie Sanders. Avec des chiffres encore partiels, Biden, 77 ans, devance désormais son adversaire de 286 délégués (1 147 à 861) et renforce son statut de grand favori. Un candidat doit obtenir 1 991 délégués pour emporter dès le premier tour la nomination du parti lors de la convention démocrate, qui doit se tenir mi-juillet, et faire face à Donald Trump lors de la présidentielle de novembre.
«Nous faisons un pas de plus vers la nomination du parti démocrate», a affirmé Joe Biden, qui s'est exprimé sobrement depuis sa maison de Wilmington (Delaware), après avoir consacré une bonne partie de son discours à évoquer la crise sanitaire et économique actuelle. Comme lors de ses précédentes victoires, l'ancien vice-président a tendu la main à son rival Sanders, 78 ans, et à ses supporteurs, notamment les jeunes progressistes, qui plébiscitent le socialiste et ses propositions de réformes (couverture santé universelle et publique, salaire minimum, plan ambitieux de lutte contre le changement climatique, etc.) «Aux jeunes électeurs qui ont été inspirés par le sénateur Sanders, je veux dire : je vous entends, je sais ce qui est en jeu», a assuré Biden.
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Le coronavirus a bouleversé la campagne, les deux rivaux démocrates, comme Donald Trump, ayant dû annuler leurs meetings. Un quatrième Etat, l'Ohio, devait participer à cette nouvelle journée d'élections mardi. Mais face à la progression rapide de la pandémie (plus de 6 300 cas recensés aux Etats-Unis et 108 décès), et aux consignes pour endiguer la propagation du virus, le gouverneur de l'Ohio a annoncé, à quelques heures de l'ouverture des bureaux de vote, le report de cette primaire. La Louisiane, la Géorgie, le Kentucky et le Maryland ont déjà reporté leurs scrutins à mai et juin, et d'autres Etats pourraient leur emboîter le pas. Le parti démocrate, lui, appelle les Etats qui doivent encore voter à renforcer leurs moyens de vote anticipé ou par courrier. «Notre démocratie repose sur le droit de vote et nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger et renforcer ce droit, au lieu de mettre notre fonctionnement démocratique à l'arrêt», insiste son président, Tom Perez.
Nomination à portée de main
En pleine pandémie, la participation aux primaires de mardi était en nette baisse dans l'Illinois par rapport à 2016, selon les premiers chiffres disponibles. Au contraire de la Floride, où près de 2 millions d'électeurs se sont rendus aux urnes (contre 1,7 million il y a quatre ans), notamment grâce au vote par anticipation ou par correspondance. «Le parti démocrate a ignoré les avertissements des scientifiques et fait pression pour continuer ces élections en personne en pleine pandémie meurtrière, plutôt que de les retarder jusqu'à la mise en place [généralisée] du vote par correspondance», a critiqué un conseiller de Bernie Sanders, David Sirota, sur Twitter mardi.
La nomination de Biden, soutenu notamment par les électeurs afro-américains et les démocrates âgés, semble aujourd'hui à portée de main. Bernie Sanders ne parvient pas, Etat après Etat, à élargir sa base électorale. Elle s'effrite même dans l'Arizona, où les votes des Latino-américains, qui lui avaient notamment permis de remporter la Californie et le Nevada, se répartissent plus équitablement entre les deux candidats, selon les sondages de sortie des urnes du New York Times. En Floride, les Latino-Américains, qui représentent 20 % de l'électorat démocrate, ont même préféré Joe Biden au sénateur du Vermont, selon les sondages de sortie d'urnes d'AP. Les Américains d'origine cubaine notamment, qui auraient peu goûté que Bernie Sanders, dans une interview télévisée en février, salue le programme d'alphabétisation de Fidel Castro.
Sanders reste encore en course
Sanders, qui n’a pas attendu les résultats pour s’exprimer en vidéo sur internet mardi soir, n’a pas évoqué l’avenir de sa campagne, concentrant sa déclaration sur la pandémie. Au nom de l’unité du parti, et de l’avance de plus en plus insurmontable de Biden, certains démocrates lui demandent d’abandonner la course. Bernie Sanders n’a pas encore décidé de jeter l’éponge, et peut chercher à pousser son adversaire centriste plus à gauche, comme il l’avait fait avec Hillary Clinton en 2016. Voulant d’ailleurs donner des gages à l’aile progressiste du parti, Joe Biden a annoncé dimanche qu’il adoptait des propositions inspirées de celles de Bernie Sanders sur l’allègement de la dette étudiante, et de son ancienne rivale, la sénatrice Elizabeth Warren, pour protéger les Américains des abus des créanciers.
Donald Trump a, lui, déjà sécurisé l’investiture républicaine : il a franchi ce mardi le cap de délégués nécessaires pour être désigné vainqueur des primaires républicaines, une formalité dans sa campagne de réélection. Le président américain n’a jamais été menacé, même si trois anciens élus s’étaient lancés dans la course. Après deux abandons, il ne restait qu’un rival, l’ancien gouverneur du Massachusetts Bill Weld, qui n’a récolté que des scores marginaux.