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Libération
Isolement

Coronavirus : le régime iranien rejette finalement l'assistance de MSF

L'ONG devait déployer un hôpital gonflable dans la province d'Ispahan. Alors que le matériel et l'équipe venaient d'arriver sur place, les autorités ont brutalement changé d'avis.
Des pompiers iraniens désinfectent une rue de Téhéran. (WANA NEWS AGENCY/Photo Wana News Agency via Reuters)
publié le 24 mars 2020 à 22h11

Téhéran a fait volte-face : Médecins sans frontières (MSF) ne pourra finalement pas déployer son hôpital gonflable à Ispahan pour aider les autorités iraniennes à lutter contre l’épidémie de Covid–19 qui frappe durement le pays. Au moins 1 934 personnes en sont mortes, et 24 811 sont contaminées, selon le dernier bilan officiel, très certainement sous-estimé. Le ministère de la Santé iranien a déclaré mardi matin avoir suffisamment de moyens et ne plus avoir besoin des cinquante lits apportés et gérés par l’ONG.

Premiers doutes

Dans un geste inhabituel, la République islamique avait consenti à appeler des renforts début mars, quelques jours après avoir rendu public les premiers décès. MSF a proposé ses services, acceptés par les autorités iraniennes qui ont même demandé à l’organisation d’intervenir dans la province Ispahan.

Les neuf membres de l’équipe de MSF venus de France ont ensuite reçu des visas. Ils ont débarqué samedi à Téhéran, sont sortis sans encombre de l’aéroport et ont commencé les repérages à Ispahan. Le lendemain, dimanche, un premier avion-cargo a atterri à Téhéran en provenance de Bordeaux. Un autre a suivi lundi en fin de journée. Entre-temps, l’ambassadeur d’Iran en France, Bahram Ghassemi, a annoncé sur Twitter le lancement de cette mission de MSF, sur laquelle l’ONG restait discrète tant qu’elle n’avait pas commencé.

Des premiers doutes ont commencé à poindre dans la journée de lundi. Les autorités sanitaires iraniennes tenaient avec insistance à organiser une réunion avec MSF. Le soir même, un conseiller du ministre de la Santé remercie MSF pour son concours, tout en affirmant que son aide n’est plus nécessaire. La position sera réaffirmée de manière plus solennelle mardi matin, par le porte-parole du ministère.

«Incompréhension totale»

«On prend acte de cette décision, même si elle nous plonge dans l'incompréhension totale, confie Michel-Olivier Lacharité, le responsable des programmes d'urgence basé à Paris. Mardi après-midi, l'équipe sur place de MSF n'avait toujours pas rencontré les responsables iraniens. Les humanitaires ont néanmoins regagné la capitale, l'ONG imagine maintenant sortir l'hôpital d'Iran pour un autre pays de la région, tout en se disant disponible si Téhéran contre-braquait. «Le constat sur les besoins reste valable», ajoute Lacharité.

En revanche, MSF peine à s’expliquer le reniement iranien qui, s’il est définitif, l’aura contraint à faire voler deux cargos pour rien. Les cercles sécuritaires iraniens, et singulièrement les tout-puissants Gardiens de la révolution, sont très hostiles à toute présence étrangère, réduite à une portion congrue pour un pays de cette taille : seule une poignée d’ONG travaille en Iran.