«Jusqu'à aujourd'hui, j'avais refusé d'appliquer ces mesures sur la population civile, mais nous n'avons plus le choix.» Ainsi parlait, le 14 mars, le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou. Les «mesures» en question ? Un euphémisme désignant le feu vert donné au Shabak, le tout-puissant organe de la sécurité intérieure, d'étendre ses moyens de surveillance antiterroriste aux porteurs du coronavirus, afin d'en cartographier les déplacements récents et d'identifier les personnes éventuellement contaminées à leur contact.
Sueurs froides
«En soi, ce n'est rien de très sophistiqué, considère le chercheur en sécurité informatique Iftach Ian Amit. Il s'agit simplement d'utiliser à de nouvelles fins les métadonnées que les services de renseignement amassent depuis des années.» Selon les révélations du journaliste d'investigation Ronen Bergman dans le New York Times puis le quotidien Yediot Aharonot, les opérateurs télécoms transfèrent discrètement depuis 2002, sur ordre du Premier ministre, les données de leurs clients au Shabak, qui a constitué une base aussi gargantuesque qu'opaque, en principe limitée à la prévention des attentats-suicides. «Tous les appels, tous les messages, toutes les localisations, tout le temps, résume Bergman. Tout ce que Nétanyahou et le ministère de la Santé ont eu à faire était de désactiver l'utilisation sécuritaire de ce référentiel, et d'entrer les noms des patients atteints par le coronavir