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Libération
Royaume-Uni

Coronavirus : Boris Johnson hospitalisé, le gouvernement mis à l’épreuve

Le Premier ministre britannique en soins intensifs, le ministre des Affaires étrangères a pris mardi l’intérim à Downing Street sans pour autant avoir les mêmes pouvoirs. Une situation inédite et floue, en l’absence de constitution écrite.
Boris Johnson, sur le seuil du 10, Downing Street, a applaudi jeudi le NHS. (Photo Pippa Fowles. AP)
publié le 7 avril 2020 à 20h11

La reine Elizabeth II a envoyé un message à Boris Johnson, à sa fiancée Carrie Symonds, enceinte, et à sa famille. David Cameron et Theresa May, ses prédécesseurs à Downing Street, ont annoncé «prier» pour qu'il se remette vite. Le président américain, Donald Trump, a proposé d'envoyer la cavalerie, sous la forme de compagnies pharmaceutiques américaines qui travaillent sur le Covid-19. Le Royaume-Uni a poliment décliné. Le pays, et une partie du monde, reste suspendu à l'évolution de l'état de santé du Premier ministre britannique. Mardi soir, Boris Johnson restait hospitalisé en soins intensifs au St Thomas' Hospital, l'un des meilleurs hôpitaux universitaires du Royaume-Uni. C'est là qu'avait été soigné, début février, l'un des premiers malades du Covid-19 identifiés dans le pays. C'est aussi cet hôpital qui a traité le plus de patients contaminés.

Le Premier ministre britannique s'apprêtait mardi soir à passer sa troisième nuit dans cet hôpital posé au bord de la Tamise, avec une vue spectaculaire sur le Parlement de Westminster. Son dernier bulletin de santé, communiqué dans la soirée lors de la conférence de presse quotidienne du gouvernement, le disait dans un «état stable», conscient, et avec «un bon moral». Il «respire sans assistance», avec l'aide d'un apport d'oxygène par masque mais sans être branché sur un respirateur artificiel. Il ne souffre pas de pneumonie, avait précisé un peu plus tôt son porte-parole.

A priori, Boris Johnson, 55 ans, ne souffre pas de pathologies antérieures, si ce n’est une tendance au surpoids. Il joue souvent et très bien au tennis, aime courir et, avant de s’installer à Downing Street, effectuait la plupart de ses déplacements à vélo.

«Un battant»

Son intérim à la tête du gouvernement, le ministre des Affaires étrangères Dominic Raab, a insisté sur le fait qu'il était «entre de bonnes mains». «Il n'est pas seulement notre Premier ministre, il n'est pas seulement notre chef, il est aussi notre collègue et notre ami», a-t-il déclaré, avant de se dire «confiant sur le fait qu'il va s'en sortir, parce que s'il y a une chose que je sais du Premier ministre, c'est que c'est un battant.»

L’incapacité de Boris Johnson à remplir son rôle de Premier ministre a suscité un certain nombre d’interrogations. Qui gouverne désormais le Royaume-Uni ? La constitution non écrite du pays implique un processus plutôt flou dans une telle situation. Si des Premiers ministres ont été, dans le passé, malades ou même hospitalisés, c’est la première fois qu’un tel événement se produit alors que le pays traverse une crise sanitaire sans précédenrs.

La charge d'intérim dévolue à Dominic Raab ne lui donne pas les mêmes pouvoirs qu'au Premier ministre. Il ne peut pas, par exemple, prendre la décision de lever les mesures de confinement instaurées depuis un peu plus de deux semaines. Lors de sa conférence de presse, il a balayé l'idée de devoir trancher sur des questions délicates et a insisté sur la «responsabilité collective».

«Le Premier ministre m'a demandé de prendre l'intérim pour le temps qu'il faudra», a-t-il ajouté. Les décisions devraient se prendre collégialement, par l'ensemble du cabinet, qui rassemble les 26 principaux ministres. Ce qui pourrait poser problème en cas de désaccord et de nécessité de trancher rapidement. L'un des principaux ministres, Michael Gove, en charge du bon fonctionnement du gouvernement, a annoncé mardi qu'il s'isolait chez lui, alors qu'un membre de sa famille souffre de symptômes «modérés» du virus. Mais a indiqué être encore en bonne santé.

Codes nucléaires

Vu le nombre de personnes atteintes au sein du gouvernement - le ministre de la Santé, Matt Hancock, et le conseiller médical en chef, Chris Whitty, ont aussi été malades mais sont remis ; le conseiller spécial Dominic Cummings est toujours malade et en retrait… -, Downing Street a pris la précaution de prévenir que si jamais Dominic Raab venait lui aussi à être touché, ce serait le chancelier de l’Echiquier, Rishi Sunak, qui reprendrait les rênes. Mais a en revanche refusé de préciser qui, à l’heure actuelle, détient les codes nucléaires du pays.

Le Royaume-Uni a enregistré mardi 786 décès des suites du Covid-19, un record. Ce qui porte le bilan à 6 159 morts. Ce nombre ne comprend pas les décès dans les maisons de retraite ou à domicile. Les mesures de confinement, imposées le 23 mars, seront revues la semaine prochaine, a indiqué Dominic Raab. Mais il faut attendre d'avoir atteint le pic de l'épidémie et, a-t-il dit, «nous n'en sommes pas là».