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Covid-19 : Macron bille en tête sur la dette africaine

Un moratoire sur le remboursement des dettes publiques des Etats les plus vulnérables devrait être annoncé ce soir à l'issue d'une réunion des ministres des Finances du G20.
Emmanuel Macron, le 7 avril. (GONZALO FUENTES/Photo Gonzalo Fuentes. AFP)
publié le 15 avril 2020 à 17h39

Dans son discours à la nation, lundi soir, Emmanuel Macron a évoqué une «annulation massive» de la dette des pays les plus pauvres pour «aider nos voisins d'Afrique» à surmonter la crise économique qui s'annonce dans le sillage de la pandémie de Covid-19. D'annulation, il n'est en réalité pas question pour le moment, même si le président de la République a répété, mercredi matin sur RFI, être «favorable» à une «initiative» en ce sens. En revanche, un moratoire sur le service de la dette – qui suspend le remboursement des prêts – devrait être annoncé ce mercredi soir, à l'issue de la réunion des ministres des Finances du G20.

Versement d’une aide d’urgence

«C'est une formidable avancée, a insisté Emmanuel Macron, qui a défendu cette proposition. Le temps de la crise, on laisse les économies africaines respirer.» Le président français, invité à participer à une réunion téléphonique avec 10 chefs d'Etat à l'initiative de l'Union africaine, le 3 avril, se veut à la pointe de «l'axe de solidarité euro-africain» pour lutter contre le Covid-19 et ses répercussions économiques. Dans une tribune publiée ce mercredi sur le site de Jeune Afrique, il appelle, aux côtés, de 18 chefs d'Etat, de gouvernement et d'institutions internationales, à "une réponse multilatérale pour l'Afrique".

Le Fonds monétaire international a par ailleurs annoncé lundi le versement d'une aide d'urgence à 25 pays dont 19 africains. Le Fonds fiduciaire d'assistance et de riposte aux catastrophes, et ses «500 millions de dollars de ressources immédiatement disponibles», va leur permettre de couvrir pour six mois les remboursements de la dette due au FMI et «d'allouer une plus grande partie de leurs ressources à leurs efforts en matière d'urgence médicale et d'aide», selon le communiqué de l'institution internationale.

«Annulations de dette»

La dette extérieure publique africaine du continent a plus que doublé entre 2010 et 2018, passant de 160 milliards à 365,5 milliards de dollars. Le moratoire, «une première mondiale», a insisté Emmanuel Macron, offre donc un répit budgétaire en 2020 aux pays les plus vulnérables. L'accord ira «bien au-delà du Club de Paris», le groupe de créanciers publics qui travaille habituellement sur la question de la restructuration des dettes à l'échelle mondiale, assure l'Elysée : «La Chine et les pays du Golfe» devraient notamment s'engager dans le moratoire. La participation de Pékin, qui détient aujourd'hui 40 % des dettes du continent africain (soit 145 milliards de dollars), était incontournable.

«L'étape suivante, ce sont les annulations de dette. Cette question ne va pas être tranchée toute de suite, avoue un conseiller élyséen. Pendant le moratoire, on va pouvoir examiner, pays par pays, la soutenabilité de la dette, pour juger de la pertinence a minima d'un rééchelonnement, a maxima d'une annulation. En contrepartie, on va demander aux Etats d'ouvrir leurs comptes.» La Chine, qui n'est pas membre du Club de Paris, acceptera-t-elle de tirer un trait sur ses créances ? Réponse d'Emmanuel Macron, au micro de RFI : «Je n'ai pas eu une discussion avec Xi Jinping sur ce sujet», mais «je ne doute pas une seule seconde que pour le président chinois, la situation de l'Afrique justifie un geste de cette importance. […] La Chine y aura son rôle et sa part.» Le président français espère beaucoup, mais s'est donc engagé un peu vite. Il l'admet lui-même, citant l'Union africaine : l'annulation de la dette, «on n'y arrivera pas tout de suite».